Transcription – Épisode 2 : Entretien avec Peter M. Boehm

David Morrison : Bonjour Peter, merci de vous être arrêté au siège social international des Dossiers d’AMC. Avant d’aller plus loin, nous devons tous deux garder à l’esprit qu’il s’agit d’une tribune publique et que nous devons nous abstenir de discuter ou de divulguer des renseignements sensibles ou classifiés. De plus, conformément à la Loi sur les langues officielles du Canada, je vous encourage à parler dans la langue de votre choix et j’en ferai de même.  Normalement, nous discutons en anglais, mais nous pouvons le faire en espagnol ou en français ou dans la langue que vous préférez. Nous nous connaissons depuis des années, alors... une chose que j’ignore, c’est comment la famille Boehm est venue de Transylvanie à Kitchener.

Peter Boehm : Bien, merci de me recevoir David. Merci pour l’invitation d’être ici. C’est vraiment un « experiment », je sais. Mais de toute façon, je suis prêt pour toutes les questions et pour la discussion.  Mes... mes parents sont issus d’un groupe minoritaire allemand appelé les Saxons de Transylvanie, ou les Saxons, qui a quitté ce qui est maintenant le Luxembourg au 12e siècle pour se rendre dans le pays qu’on appelle maintenant la Roumanie, mais qui faisait partie de l’Empire Autriche-Hongrie, aussi connu sous le nom de Transylvanie, qui a bien sûr toutes sortes de connotations – vampires et tout ce qui s’en suit – ce qui est assez chouette. Et si vous y allez un jour, vous verrez qu’il y a des châteaux et vous entendez des loups qui hurlent et vous pensez : oui, c’est... c’est exact. Alors ils étaient... ils étaient des réfugiés, ils ne se sont rencontrés qu’au Canada, ils se sont rencontrés à Kitchener, mais ils ont dû fuir en septembre 1944 alors que des villages entiers ont été... été évacués devant l’avancée de l’Armée rouge. Pendant... pendant la guerre et étant des Allemands d’origine, bien sûr, il n’y avait pas d’autre choix que de... que de partir parce qu’ils étaient perçus comme étant du mauvais côté, même s’ils n’étaient d’aucun côté. Mais ils se sont rencontrés à Kitchener et c’est là que je suis né et c’est là que je suis allé à l’école, et les samedis je suis allé à l’école allemande et j’ai appris à lire et à écrire l’allemand aussi, ce que je ne pensais pas pouvoir utiliser plus tard dans la vie. Mais il se trouve que je l’ai fait. Et voilà, voilà essentiellement mon... mon enfance.

David Morrison : Donc, quand... quand Peter dit qu’il l’a fait, c’est parce qu’il est devenu ambassadeur du Canada en Allemagne, ce qui a dû être un moment de fierté pour ses... pour ses parents. Mais avant d’en arriver là, comment le garçon de Kitchener peut-il avoir cette brillante carrière internationale, qui vous a vu, Peter, comme chef de mission à deux reprises, comme sous-ministre dans quatre différentes... quatre différentes fonctions? Avez-vous toujours voulu rejoindre le Service extérieur? Avez-vous toujours été tourné vers l’international?

Peter Boehm : Oui et non. Je n’avais pas pensé au Service extérieur avant de recevoir des lettres de refus de diverses universités où je voulais enseigner. Je me voyais donc en train de faire des études et d’obtenir un doctorat, en espérant me trouver un emploi d’enseignant quelque part et cela n’a pas fonctionné. Mais j’ai fait une maîtrise en affaires internationales et c’est là que j’ai eu la piqûre. Et j’avais fait mon mémoire de recherche sur le Commonwealth et je me suis dit, mince alors, ne serait-il pas génial d’écrire au premier ministre et de lui poser des questions précises et d’utiliser ses réponses dans mon... dans mon mémoire de recherche? Et je l’ai fait et, bien sûr, Pierre Elliott Trudeau a répondu. Et j’ai pensé à ce moment-là que j’étais devenu accro, donc avant de partir en Écosse pour faire mon doctorat, j’ai passé l’examen du Service extérieur. Je n’ai jamais eu de réponse, alors j’imagine que j’ai échoué avec distinction. Et puis je l’ai passé de nouveau plus tard pendant que j’étais toujours aux études. Alors que je recevais ces lettres qui... qui disaient essentiellement : « Merci de l’intérêt que vous portez à ce poste, vous ne nous intéressez pas. » J’ai reçu un coup de fil inattendu : « Pourrais-je me présenter à une entrevue? » Et je l’ai fait. J’ai eu une deuxième entrevue... également et par la suite, éventuellement, une offre d’emploi m’a été présentée et je me suis joint à l’équipe à titre de stagiaire de niveau 1 du Service extérieur.

David Morrison : Alors, savez-vous si vous vous êtes joint à l’équipe à la suite de votre premier examen ou de votre deuxième examen? Est-ce qu’ils vous sont revenus à ce sujet?

Peter Boehm : Oh, ce serait le deuxième, le deuxième examen. Je pense que j’ai échoué lamentablement au premier examen.

David Morrison : Donc, vous y êtes allé — j’ai pensé à vous quand nous avons appris à nous connaître dans le contexte de... dans le contexte d’un latino-américaniste. Vous avez été affecté à Cuba, en tant qu’ambassadeur à l’OEA, au Costa Rica. Mais vous... vous avez également consacré beaucoup de temps au dossier américain, ainsi qu’à ceux de l’Europe et du G7. Alors qu’est-ce... qu’est-ce que vous n’avez pas fait? Ou avez-vous tout fait?

Peter Boehm : J’ai tout fait, mon vieux. En fait, quand je fais le bilan. Je n’aurais jamais pensé que je finirais par faire du développement et de la politique d’aide au développement et que j’en serais le sous-ministre. Ce que je n’ai pas tant fait, c’est peut-être la politique commerciale, même si je me suis intéressé à l’AECG lorsque j’étais ambassadeur en Allemagne. Mais je ne pense pas qu’il y ait quoi que ce soit dont je n’ai pas vraiment abordé. Je ne pensais pas non plus me retrouver dans le domaine de la sécurité nucléaire, et j’étais le sherpa pour cela, tout en étant sous-ministre du Développement international. S’il y a une combinaison étrange, c’est bien celle-là. Donc, c’est très complet et très large.

David Morrison : Donc j’ai – Peter et moi avons appris à nous connaître il y a de nombreuses années quand, encore une fois, le Canada était le pays hôte du G7. C’était en 1995 et à Halifax. J’étais alors en poste à Cuba. Je ne connaissais cet homme Peter Boehm que par réputation, et on a annoncé que le Canada serait l’hôte du Sommet et que Peter serait le directeur des politiques. Donc, à l’époque, il n’y avait pas de courriel, alors je vous dis tout cela pour voir si Peter s’en souvient. Mais je lui ai envoyé une lettre qui, à l’époque, devait passer par la valise diplomatique, exprimant mon intérêt à joindre l’équipe du Sommet. Peter m’a aimablement répondu et sa lettre disait : « La prochaine fois que vous serez à Ottawa, rencontrons-nous. » J’ai donc donné suite à cela en disant : « Allons déjeuner. » J’ai donc rencontré cet homme appelé Peter Boehm dans la file à la cafétéria. Nous avons tous les deux pris nos plateaux pour déjeuner et il s’avère que j’avais oublié mon portefeuille. Alors je me présentais à ce type pour obtenir un super boulot et je lui ai refilé une facture de repas. Ce n’est pas la meilleure pratique recommandée pour les membres du ministère lorsqu’ils tentent de... d’obtenir des emplois! Quoi qu’il en soit, Peter reviendra au G7 dans un instant parce que cela se passe dans Charlevoix juste après que les gens auront écouté cette balado. Mais avant de revenir à votre parcours au sein du ministère, je veux maintenant aborder le côté personnel, parce que plusieurs des – Peter a été SMA au sein du ministère, sous-ministre au sein du ministère et nous savons que plusieurs des préoccupations soulevées dans le cadre des séances de discussion ouverte et dans tout le réseau des ressources humaines portent sur la gestion de la vie privée et professionnelle, quand vous êtes membre du Service extérieur. Je veux donc vous demander, Peter, de nous parler du fait de faire partie d’un couple d’employés et d’être aussi le père d’un enfant ayant des besoins spéciaux et de la façon dont cela a façonné votre carrière et vos perspectives.

Peter Boehm : Bien merci, David, et permettez-moi de dire d’entrée de jeu que ce déjeuner que j’ai payé pour vous, je crois que vous l’avez remboursé en entier à de maintes reprises par vos efforts, votre travail ardu et toutes les autres choses fantastiques que vous faites. Oui, en effet, je crois que c’est un défi au sein du Service extérieur. Tout d’abord, la mobilité est un défi, et si vous avez une famille et une relation de type nucléaire, il y a les autres défis qui s’y rattachent. Ma conjointe est-elle heureuse? Est-elle vraiment heureuse? Que peut-elle faire? Qu’en est-il de nos enfants, le cas échéant? L’école est-elle suffisante? Y a-t-il des services de santé là-bas? Nous sommes présents dans certains pays où les services ne correspondent pas aux nôtres, et il faut... il faut s’en... s’en préoccuper. Nous en avions un... un, un enfant, un jeune... jeune enfant lorsque nous sommes allés à Cuba pour la première affectation. Nous en avons eu un autre pendant cette période, puis un autre au... au Costa Rica. Nous en avons maintenant quatre en tout, mais notre troisième... notre troisième fils au Costa Rica (il est né là-bas) a commencé à afficher des comportements différents après l’âge de deux ans, ou vers l’âge de deux ans. Et il était un enfant actif... très actif, parlant anglais, parlant espagnol. Et il s’est avéré qu’il était autiste. Alors que faire? Eh bien, vous revenez en arrière, vous faites l’analyse. Vous voulez le guérir. C’est l’instinct de tout le monde. Et habituellement, la première étape est le déni, ensuite vous voulez continuer et voir ce qui est le mieux pour lui, et puis vous finissez par arriver à un endroit où il s’agit d’accommodement non seulement pour votre enfant, votre être cher qui a des besoins spéciaux, mais aussi pour vous... pour vous-même. Et dans un contexte familial, c’est incroyablement difficile, donc...

David Morrison : Avez-vous essayé de faire cela lors de votre affectation ou à votre retour au Canada, ou une combinaison des deux?

Peter Boehm : Eh bien, c’était, c’était... en affectation parce que ma... ma conjointe a dû revenir avec lui pour un diagnostic parce que nous ne pouvions pas faire de diagnostic au Costa Rica ou pas — du moins pas d’une façon que nous pourrions comprendre. Vous voulez avoir votre propre système pour cela. Et puis c’est devenu un cas de – avec le retour à Ottawa – nous avons essayé d’obtenir les meilleurs services et de voir ensuite, d’accord, si nous avons des services, à quel autre endroit pourrions-nous être affectés qui serait logique, et c’est pourquoi Washington est devenu une option. J’ai eu la chance d’aller à... à l’OEA. Et puis j’ai été muté de Washington à Washington, ce que certains voyaient comme un magnifique changement de carrière. Mais cela n’a pas été fait pour des raisons de carrière. D’accord. C’était pour préserver les services que Nicholas... recevait.

David Morrison : Nicky était dans une école vraiment formidable, je crois, à Washington.

Peter Boehm : C’est exact. C’est, c’est exact, et il recevait d’autres... d’autres sortes de traitements, etc. Alors ce que j’ai tiré de cela, c’est qu’au fil du temps, vous développez une certaine... une certaine résilience. Vous vous rendez compte que le travail est en fait assez secondaire et vous réalisez que le stress et l’anxiété que vous ressentez, vous le sentez à titre... à titre personnel... ou dans votre propre unité familiale ou au nom de votre enfant. Et cela n’a rien à voir avec le stress et l’anxiété que vous ressentiriez au travail. « Oh, le ministre a besoin de cela tout de suite. » Eh bien, d’accord, c’est... c’est génial. Alors que si Nicholas a un problème à son école ou ailleurs, je laisserais tout tomber et juste... et j’accourrais. Cela m’a donc donné une perspective différente et les gens disent alors, ils disent : « Comment restez-vous si calme tout le temps? » Eh bien, c’est une question de perspective. Et donc au cours de ma carrière, j’ai également découvert qu’il y a d’autres personnes dans le... dans le service, au sein du ministère, qui ont des préoccupations semblables, qu’il s’agisse d’un enfant, d’un conjoint ou même d’elles-mêmes. D’où mon... mon grand intérêt pour la santé mentale.

David Morrison : Avez-vous eu l’impression — pour vous, c’est un voyage qui s’est échelonné sur plusieurs décennies — avez-vous eu l’impression que le ministère vous appuyait officiellement, que le gouvernement vous appuyait officiellement ou que le soutien provenait de réseaux d’autres personnes qui vivent des situations semblables?

Peter Boehm : Je... Je crois qu’il s’agit de différents facteurs. Il... le réseau est certainement utile. Et aussi une volonté de prendre les devants et de dire : « Voici ma situation et je suis déterminé à la résoudre à l’intérieur; qu’il s’agisse des directives du Service extérieur ou de quoi que ce soit d’autre, je veux qu’on m’accommode. » Et le problème que vous avez dans tout contexte gouvernemental, c’est qu’il s’agit de bureaucratie. Donc, monsieur Boehm, votre cas sera soumis au groupe de travail B, et il y aura 20 personnes dans une salle qui se pencheront là-dessus pour décider si vous pouvez obtenir les services pour votre enfant en... en affectation. Donc, cela devient parfois dépersonnalisé et avilissant, ainsi que... aussi pour la personne. Mais vous... vous, vous allez de l’avant et vous persévérez, et quelques-uns d’entre nous ont eu des problèmes semblables qui, je crois, étaient à l’avant-garde d’essayer de pousser le système. Parce que si on ne pousse pas le système, rien ne va se passer.

David Morrison : En ce qui a trait aux gestionnaires individuels, Stefanie Beck était ici il y a une semaine et elle a parlé de la vie au sein du Service extérieur en tant que mère monoparentale et les choses qu’elle a dû faire. J’ai assurément découvert que les patrons ou gestionnaires dans cet édifice ou au sein du gouvernement sont très accommodants pour les familles et les enfants ayant des besoins spéciaux ou les exigences spéciales des familles. C’est un employeur très favorable à la famille. Avez-vous constaté la même chose?

Peter Boehm : Je crois que oui, mais je pense que cela a aussi pris du temps. Donc, quand je me suis joint au Service extérieur, on avait l’impression que vous étiez essentiellement enchaîné à votre bureau. Nous... l’ordinateur était quelque chose de relativement nouveau. Nous n’avions pas de BlackBerry, alors la plupart du travail que nous faisions ne se résumait pas à sortir le BlackBerry à tout moment de la journée, les gens avaient l’impression de devoir rester et travailler de longues heures et tout type de réduction de cela ou la démonstration que vous aviez d’autres préoccupations plus personnelles étaient interprétés comme un signe de faiblesse. Ensuite, vous vous engagiez dans une sorte d’autocensure ou d’auto ajustement parce que vous pensiez que cela aurait un impact sur votre carrière. Je pense que cela a changé. Mais c’était certainement l’attitude quand... ou l’attitude perçue quand je me suis joint à l’équipe. C’est peut-être simplement mon interprétation.

David Morrison : Eh bien, je pense que vous n’obtenez pas ce que vous ne demandez pas. Et je pense que la technologie a aidé et je crois, j’espère, que mes collègues sont maintenant plus disposés à parler et à dire : « Voici ma situation. J’ai bien un BlackBerry, il est possible de me joindre, mais entre deux et quatre heures ou entre cinq et sept heures aujourd’hui, je ne suis pas disponible. »

Peter Boehm : Eh bien, et vous devez également être prêt à dire non. Et quand notre quatrième enfant est arrivé, nous étions... nous étions en affectation à Washington. J’étais censé revenir afin de devenir sous-ministre adjoint. Et j’ai dit au sous-ministre : « Vraiment, j’aimerais prendre un congé parental de cinq mois. » Aucun SMA masculin ne l’avait fait à ce stade. Ce n’est pas que je sois un lanceur de mode ou quoi que ce soit, c’est simplement que j’ai eu l’impression que c’était vraiment... la bonne chose à faire et je ne le regrette pas. Et j’ai dit : « Et si vous voulez que quelqu’un d’autre prenne le poste, ça me va. » Et il a dit : « Non, non. Eh bien, la personne que vous remplacez n’aura qu’à attendre son affectation et vous prenez... vous prenez votre congé. » Je pense donc que c’était une décision très intelligente de la part du SM de l’époque. La personne que j’ai remplacée n’était pas tout à fait du même avis, mais tout s’est bien passé. C’était un choix intelligent.

David Morrison : Donc... quand on dit qu’il faut parfois dire non, vous... quand on est sous-ministre depuis si longtemps, qu’on a été sherpa et qu’on a occupé les diverses fonctions dans lesquelles vous avez travaillé... vous avez travaillé de près avec un certain nombre de premiers ministres. Je sais que vous avez beaucoup parlé de notre premier ministre actuel et de la façon dont il aime être informé. Pouvez-vous nous parler de ce que c’est que de travailler en étroite collaboration avec divers chefs de... chefs du gouvernement ici au Canada?

Peter Boehm : C’est toujours un honneur de travailler en étroite collaboration avec le dirigeant de votre pays. Et c’est... c’est vraiment un privilège spécial. Mais cela souligne aussi le fait que les conseils que vous donnez doivent être très précis, très justes. Et si vous ne savez pas quelque chose en réponse à une question, il est utile de dire : « Je ne sais pas, monsieur, mais je vais vous revenir là-dessus » au lieu d’inventer quelque chose, de patiner ou d’être très général, comme les gens peuvent... peuvent l’être parfois. Vous vous adaptez donc rapidement au style. Tout le monde a un style différent, mais il est très intéressant d’avoir servi des premiers ministres, des premiers ministres différents, y compris de différents partis, et de constater que le but ultime est toujours l’intérêt du Canada. Et tôt ou tard, dans toute discussion ou approche, tout se résume à cela. Et c’est là qu’intervient la décision. Et c’est là que vous êtes le plus utile en tant que sherpa ou sous-ministre.

David Morrison : Maintenant, on va avoir le G7 dans une semaine je crois, peut être un peu plus.

Peter Boehm : Un peu plus oui…

David Morrison : Parle un petit peu sur les défis. C’est votre cinquième ou quatrième G7 comme « Sherpa » ou avant comme directeur. C’est spécial cette fois-ci? Il y a des défis qui ne sont pas très normaux?

Peter Boehm : Oui, en effet, on a de grands défis maintenant parce c’est d’une façon avec les dirigeants relativement nouveaux. Par exemple, l’année passée, il y avait quatre dirigeants pour la première fois à la réunion des leaders. Pour nous, c’est toujours le défi avec les grands dossiers mondiaux. Le premier ministre a choisi les thèmes de la croissance économique, un monde avec plus de paix, aussi l’environnement, les océans, et tout ça, et l’égalité des sexes aussi, alors les grands thèmes. Mais on a des événements : la Corée du Nord, l’Iran, la position des États-Unis... Comment on peut définir l’avenir des organisations internationales aussi. Alors beaucoup de travail, beaucoup de facteurs, et pour nous mettre les grands évènements sur place à Charlevoix, il y a des défis aussi. On doit avoir l’engagement avec les citoyens, avec les Charlevoisiens et Charlevoisiennes, aussi le gouvernement du Québec et même les autochtones, le processus avec les réunions ministérielles, alors la présidence du Canada c'est pendant une année entière, et il y a beaucoup de travail.  

David Morrison : À titre de partisan dévoué de tout ce qui se passe au sein du G7, j’imagine que la solidarité ou la convergence d’opinions du groupe a fléchi et s’est affaiblie, ou a fléchi et s’est affaiblie au sein du groupe – Y a-t-il quelque chose de spécial cette fois-ci? Et bien sûr, je fais en partie référence à l’administration du président Trump et à la philosophie « l’Amérique d’abord » aux États-Unis. Quels sont les défis que cela soulève au G7 cette année?

Peter Boehm : Je pense que la notion d’unanimité en tout temps et de solidarité est remise en question, tout comme la façon traditionnelle d’organiser un sommet. Ces choses ont pour but de permettre aux dirigeants d’avoir des échanges francs. C’est ce qu’ils ont. Et on m’a souvent demandé : « Eh bien, pourquoi dépenser autant d’argent et avoir toute la sécurité pour... pour un événement? » Eh bien, les dirigeants les aiment. Et même ceux qui sont nouveaux reconnaissent la valeur d’une conversation franche. Et s’ils s’entendaient sur tout, il ne serait pas nécessaire de tenir ces rencontres. Alors, trouver la bonne voie, c’est très important pour le premier ministre et moi en tant... en tant que son sherpa à cette occasion, de trouver les points où nous avons la cohésion et l’unanimité, et ceux où nous ne les avons pas, puis de nous permettre d’avoir une discussion franche afin de tous connaître nos différents... différents points de vue. Et je crois que le dossier du succès du G7 est connu en ce qui a trait à faire avancer les enjeux et à tourner ce cadran juste... juste un peu pour influencer d’autres organisations ou même au sein de nos propres pays relativement à notre manière de légiférer et aux choses que nous voulons faire. Les changements climatiques en sont un bon exemple. C’est aussi une source de division. En rétrospective, il y a quelques années, M. Harper a fait progresser l’Initiative sur la santé des mères, des nouveau-nés et des enfants — qui est toujours en cours — à Muskoka... qui se poursuit et ainsi de suite. Il y aura donc quelques éléments qui sortiront du sac également pour ce qui est de la façon dont nous voulons pousser et changer les choses. Il y a donc une grande... il y a une grande valeur à cela. Mais le truc est de s’assurer que tout le travail mène à cela. Donc, les réunions ministérielles qui ont eu lieu jusqu’à maintenant, les diverses réunions des sherpas, les autres séances de mobilisation — tout cela contribue, espérons-le, à dégager un consensus sur un certain nombre de grands enjeux.

David Morrison : Donc, le deuxième sommet du président Trump; qui sont les petits nouveaux?

Peter Boehm : Il n’y aura peut-être qu’un petit nouveau cette année, et ce sera le premier ministre italien. Une fois la décision prise.

David Morrison : D’accord, eh bien, bonne chance. Merci. Je sais que beaucoup de gens suivront cela de près et, bien sûr, il y a beaucoup, plusieurs collègues du ministère et dans toute la ville qui sont concernés. Avant de vous laisser partir, vous en êtes aux dernières étapes de votre carrière et je me demande si vous pourriez conclure en donnant des conseils aux jeunes membres du ministère. Que feriez-vous de la même manière? Si vous étiez embauché aujourd’hui, que feriez-vous différemment? À votre avis, sur quoi devraient-ils se concentrer?

Peter Boehm : Je pense que les gens qui viennent ici sont choisis en fonction de leur talent. Ils ont beaucoup à offrir. Et il ne s’agit pas nécessairement de faire preuve de fausse modestie ou quoi que ce soit. Posez beaucoup de questions. Demandez à vos supérieurs comment ils voient les problèmes. Posez des questions sans être ennuyeux. Mais ne partez pas dans votre propre... propre monde. Et parce que nous sommes maintenant un ministère fusionné, je pense aussi qu’il est vraiment important d’examiner un aspect du ministère qui ne vous intéresse peut-être pas. Donc, si vous êtes un délégué commercial, pourquoi ne pas passer du temps à examiner ou à réfléchir à une affectation du côté du développement ou vice versa, ou du côté de la politique étrangère, bilatérale par opposition à multilatérale. Essayez d’avoir une bonne idée de ce que cela fait et...

David Morrison : Il faut encourager les gestionnaires, bien sûr, à... à choisir des gens qui ont des antécédents non traditionnels, mais c’était l’un des moteurs du projet initial de fusion. Vous pensez donc que de jeunes collègues peuvent aspirer à des carrières comme celle que vous avez eue. Eh bien, pourquoi pas?

Peter Boehm : Je veux dire, je n’ai jamais... Peut-être pas la partie Transylvanie. Eh bien, c’est un bon... bon contexte, aussi, vous savez — surtout en période nocturne. Quoi qu’il en soit, si vous, si vous... Je n’avais pas de plan, de carrière... sur le plan de la carrière, et tout s’est produit. Et certains diront : « Oh oui, eh bien, nous avons toujours su que vous vouliez être ambassadeur en Allemagne », ou peu importe, mais oui, bien sûr, c’était... c’était formidable. Je ne pensais pas vraiment que cela se produirait, alors les choses tournent parfois à votre avantage. Mais je pense que le meilleur conseil est de ne pas avoir peur. Et habituellement, la peur et la bureaucratie vont de pair. Mais n’ayez pas peur... n’ayez pas peur de poser des questions, n’ayez pas peur de montrer qui vous êtes, mais gardez aussi votre perspective parce qu’il n’y a rien de pire qu’un collègue qui pense tout savoir.

David Morrison : Eh bien, merci, Peter, je sais que vous devez vous précipiter ailleurs. Mais c’était génial. Merci de nous avoir fait part de votre sagesse et d’une partie de votre parcours de vie et ici, à Affaires mondiales.

Peter Boehm : Merci, David. Je reviendrai avec plaisir dans quelques années. D’accord.

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