Transcription – Épisode 23 : Entretien avec des participants de Canada au-delà de 150, Aleena Esmail, Andreia Santos, Poya Saffari et Roxanne Hamel

David Morrison : Aleena Esmail, Andreia Santos, Lucie Verreault, Poya Saffari et Roxanne Hamel sont des employés d’Affaires mondiales Canada au début de leur carrière. Ils figuraient parmi un groupe d’élite d’environ 80 fonctionnaires en début de carrière sélectionnés parmi près d’un millier de candidats pour un projet de neuf mois intitulé Canada au-delà de 150 : Politiques pour un avenir diversifié et inclusif. Ce petit groupe d’employés d’AMC a tenté de résoudre certains des principaux défis auxquels fait face le Canada aujourd’hui. Lucie n’a pas pu venir parce qu’elle est en affectation en Haïti, mais Aleena, Andreia, Poya et Roxanne sont venus à mon bureau récemment pour parler de leur expérience dans le cadre de Canada au-delà de 150. Eh bien, bonjour à tous. Poya, Andreia, Roxanne, Aleena, nous allons essayer quelque chose un peu différent aujourd’hui dans le cadre des Dossiers d’AMC. Vous êtes quatre professionnels en début de carrière ici au ministère. Vous avez participé à un projet à l’échelle du gouvernement intitulé Canada au-delà de 150. Nous comptons sur vous pour résoudre certains des grands problèmes auxquels le Canada fait face. Et je crois que c’est… C’était l’origine de l’expérience Canada au-delà de 150. Mais avant de passer à cela, je veux que vous parliez de vous à nos auditeurs. Commençons avec Poya.  

Poya Saffari : Bien sûr! Donc, je travaille actuellement dans une direction qui s’occupe de la planification ministérielle, du rendement et du risque, mais je… mais en fait, je travaille exclusivement dans l’expérimentation. Je suis venu à AMC en détachement du SCT au mois de mai, donc je suis arrivé plutôt récemment ici. Avant cela, j’ai été au SCT pendant quatre ans et c’est là que j’ai commencé dans la fonction publique. Je suis en quelque sorte arrivé dans la fonction publique un peu plus tard que… que la plupart des gens. Mais ouais, et avant cela, j’ai eu quelques autres carrières qui… qui ne sont pas, vous savez, qui sont un peu différentes.

David Morrison : Je… Je ne suis pas. Vous ne pouvez pas vous en sortir aussi facilement. Qu’est-ce… donnez-nous une idée de qui vous êtes.

Poya Saffari : Donc… donc, j’ai commencé par des études dans le domaine des politiques publiques, vous savez, il y a longtemps. Et ensuite, j’ai été en quelque sorte désenchanté après mon B.A. et… j’ai délaissé cela et j’ai fait des choses très différentes, donc, pendant un bout de temps, j’ai suivi un cours de charpenterie. J’ai travaillé comme charpentier. J’ai enseigné la charpenterie et j’ai aussi été actif dans une petite ferme biologique. Donc, j’ai fait cela pendant environ cinq, six ans, puis je suis retourné aux études pour faire une maîtrise. Et après la maîtrise, je me suis retrouvé…

David Morrison : C’est à ce moment que vous êtes arrivé.

Poya Saffari : ...au gouvernement.

David Morrison : Où avez-vous grandi?

Poya Saffari : Un peu partout. Je suis né en Iran. Nous sommes déménagés au Canada quand j’avais cinq ans. Et donc, nous avons vécu en Saskatchewan pendant un petit bout de temps et nous avons aussi vécu à Ottawa. Mais avant de revenir à Ottawa, j’ai passé environ 12 ans à Montréal.

David Morrison : D’accord. Andreia.

Andreia Santos : Donc, mon nom est Andreia et dans ma biographie, j’ai écrit que j’avais une double identité nationale parce que je pense que c’est vraiment ce qui me définit. Je suis fière d’être la fille d’immigrants portugais, donc je pense que cela m’a toujours en quelque sorte défini ainsi que la manière dont je vois le monde. Grandir en voyant mes parents se battre pour joindre les deux bouts a eu un grand impact sur moi et, mais j’ai aussi vu l’héritage et à quel point une communauté peut avoir un grand impact, notamment les communautés portugaises et canadiennes, les communautés canado-portugaises de Toronto. Et je pense que c’est en quelque sorte là où je veux redonner à mes parents pour… en quelque sorte pour les sacrifices qu’ils ont faits, mais aussi leur donner un rendement pour le capital investi. Je veux redonner au Canada aussi et je ne peux pas penser à un meilleur moyen de redonner que de servir et de redonner au pays qui m’a vraiment offert, ainsi qu’à mes parents, toutes ces merveilleuses possibilités.

David Morrison : Génial! Et à quel stade de leurs vies étaient vos parents lorsqu’ils sont venus à Toronto?

Andreia Santos : Ils avaient 30 ans. Donc, ils ont immigré plutôt tardivement, et ma première langue a en fait été le portugais.

David Morrison : Bien.

Andreia Santos : Donc, ouais.

David Morrison : Formidable. Roxanne.

Roxanne Hamel : Oui, Roxanne Hamel, je suis déléguée commerciale à la division de la Chine élargie. Avant d’arriver à GAC j’ai travaillé à Emploi développement social, puis aussi à transport Canada comme analyste de politique. Je suis originaire de la ville de Québec.

David Morrison : Depuis… depuis des

Roxanne Hamel : Ça fait presque

David Morrison : Des siècles?

Roxanne Hamel : Depuis des siècles, non. Ça fait ça fait à peu près cinq ans, en fait, cinq ans exactement que j’ai déménagé à Ottawa.

David Morrison : Mais, mais ta famille?

Roxanne Hamel : Ma famille, ah, ma famille oui… je ne sais pas… quatrième, cinquième, sixième, enième génération du côté.

David Morrison : De la ville de Québec?

Roxanne Hamel : De la ville de Québec, oui, oui. D’aussi loin que je sache de France.

David Morrison : Et tu as des… des membres de ta famille qui ont travaillé dans le service... pour le fédéral avant toi?

Roxanne Hamel : Non, en fait, je suis la seule qui habite en Ontario maintenant dans ma famille. Je suis la seule qui s’est un peu éloignée de la ville de Québec. Mes frères, ma famille travaille… ils sont en fait personne n’a jamais compris pourquoi je voulais quitter Québec, pourquoi je m’intéressais aux relations internationales, mais, mais voilà.

David Morrison : C’est un peu ma question.

Roxanne Hamel : Non, ça vient de, je ne sais pas, je suis un peu bon un peu le vilain canard ou l’oiseau rare de la famille.

David Morrison : D’accord. Aleena.

Aleena Esmail : Oui, mon nom est Aleena Esmail. J’ai l’impression d’avoir tant appris sur ces personnes avec qui je travaille depuis un peu plus d’un an. Donc, pour vous donner un peu de contexte, j’ai grandi dans la région du Grand Toronto. Ma famille est d’origine indienne et j’ai déménagé à Ottawa pour l’université il y a environ huit ans. J’ai commencé ma carrière à Affaires mondiales au Centre de surveillance et d’intervention d’urgence. Donc, dans le genre de monde de la gestion des urgences consulaires et maintenant, je suis conseillère en communications stratégiques pour l’Europe du côté de la politique étrangère. Je pense que vous vouliez que nous parlions un peu du, vous savez, du programme Canada au-delà de 150 et de la manière dont nous y avons participé, donc je profite de l’occasion pour remercier mon gestionnaire de l’époque pour m’avoir réellement offert des occasions, ainsi qu’à d’autres jeunes personnes ou nouveaux employés comme nous pourrions dire au ministère de… de vivre des expériences différentes de ce à quoi nous sommes habitués. Vous savez, comme je viens du domaine consulaire, je n’avais jamais travaillé dans le monde des politiques avant et je crois que j’ai vraiment appris à quel point il était utile d’obtenir différents points de vue de cela grâce à cette expérience.

David Morrison : Donc, retournons un peu en arrière. Si je comprends bien, Canada 150 ou Canada au-delà de 150 : Politiques pour un avenir diversifié et inclusif était une initiative pour rassembler de petites équipes de jeunes fonctionnaires ou de fonctionnaires relativement nouveaux afin de travailler à des défis stratégiques complexes. Et vous avez tous dû présenter votre candidature. Dites-moi… dites-nous comment cela…. Comment cela a commencé. Vous avez évidemment, avez-vous été sélectionnés ou comment. Parlez-moi… parlez-nous un peu du processus.

Roxanne Hamel : Donc le programme a été mis en place par le Bureau du Conseil privé et Horizon des politiques Canada. C’est l’organisation au gouvernement qui fait qui fait l’étude de prospectives — foresight. On a été, au total on était quatre-vingts participants au programme. Il y a avait je crois près de 800 000 candidats au début, donc on a appliqué, il fallait être, un des critères importants était d’être un fonctionnaire en début de carrière. Ce qui est intéressant avec le processus de candidature, on s’est rendu compte par après c’est bien qui ont mis aucun quota en termes de diversité, on a bien remarqué que les quatre-vingts participants, la diversité était incroyable en termes d’autant de… au niveau de la francophonie, au niveau des origines de chacun, au niveau des ministères, il y avait des participants de partout dans la fonction publique, incluant dans les régions. Comme vous avez mentionné, on nous a demandé d’étudier les problèmes complexes, les problèmes épineux. Mes collègues Aleena, Andreia ont étudié le problème du gouvernement féministe. Poya toi qu’est-ce que qu’est-ce que tu faisais?

Poya Saffari : C’était réconciliation.

Roxanne Hamel : La réconciliation. Moi j’ai travaillé sur l’avenir du travail. Il y a aussi, on a aussi une cinquième collègue que j’ai mentionnée, Lucie Verreault, qui est présentement à Haïti en affectation, qui travaillait aussi sur le gouvernement féministe. Donc, on a été divisé en petits groupes pour

David Morrison : De quelle taille?

Roxanne Hamel : Ça dépendait vraiment en fait parce qu’on nous a laissés libre cours pour choisir le dossier sur lequel on voulait travailler. Mon équipe était de huit personnes. Je crois qu’il y avait des équipes un peu plus grosses?

Payo Saffari : Oui, nous c’était dix-sept je crois à la fin.

Roxanne Hamel : Quinze peut-être pour nous.

David Morrison : Et donc vous... vous avez présenté une demande, vous avez été sélectionnés au moyen d’un mécanisme quelconque, vous vous retrouvez tous dans la même pièce un jour. Je veux dire, il y a une sorte d’événement de lancement. Vous étiez divisés en cinq groupes travaillant sur ces cinq thèmes complexes et je parle, oui, de la réconciliation, des objectifs de développement durable, du gouvernement ouvert et transparent, de l’inclusion socio-économique et du gouvernement féministe. Et vous avez un an ou neuf mois pour faire quoi?

Poya Saffari : Donc.... donc je suppose qu’au début c’est comme... donc nous nous sommes tous portés volontaires. Nous... nous avons décidé lequel de ces thèmes nous voulions examiner. C’est donc en partie la raison pour laquelle la taille des groupes varie un peu. Et c’est difficile de tout résumer, mais je pense, de toute façon, que du point de vue de notre équipe, le but du projet était de réfléchir à cette grande question complexe, en utilisant des outils que nous n’aurions peut-être pas connus autrement comme Forsite, la réflexion conceptuelle,

Roxanne Hamel : La cocréation.

Poya Saffari : Et avec ces outils en main. Donc, d’abord pour en apprendre davantage sur ces outils et ensuite, avec ces outils en main, pour en apprendre un peu plus sur chacun des sujets, chacun des domaines sur lesquels nous nous sommes penchés. Et ensuite, élaborer des idées sur la façon dont nous, en tant que fonction publique, en tant que gouvernement, pouvons en quelque sorte nous attaquer à ces problèmes. Je pense donc que cela variait, je pense que le genre de définition du problème, les façons dont nous nous y sommes pris pour trouver des solutions si vous voulez variaient d’une équipe à l’autre.

Andreia Santos : Cependant, je pense que l’élément le plus intéressant de ce projet est que nous sommes arrivés avec ces thèmes très vastes et que l’enjeu n’était pas défini au préalable pour nous. Notre réponse, tout comme notre rôle, consistait donc à définir ce problème. Pour ce faire, nous avons discuté avec les intervenants et leur avons demandé de définir le problème, ce qui est très différent de la façon dont nous faisons notre travail ici à AMC. Et je pense que c’était en quelque sorte l’une des expériences d’apprentissage les plus enrichissantes, l’une des meilleures, parce que je sais par expérience que lorsque nous examinons habituellement un enjeu, vous savez, au sein d’Affaires mondiales, nous avons déjà défini le problème.

David Morrison : Bien sûr, parce qu’on est très intelligents.

Roxanne Hamel : Exactement.

Andreia Santos : Et je pense, je ne veux pas, je pense que dans notre groupe, nous avions une vision en ce qui concerne...

David Morrison : Et votre groupe se composait de...?

Andreia Santos : désolé, l’équipe qui travaillait sur le thème du gouvernement féministe.

David Morrison : Exactement.

Andreia Santos : À titre d’équipe du gouvernement féministe, nous avions une vision de ce que nous estimions être la question la plus importante sur laquelle nous devions travailler et nous avons fini par avoir un type d’intervention entièrement différent. Au départ, nous étions préoccupés par les questions liées à la violence sexuelle et sexiste et à l’équité salariale et notre intervention a fini par porter sur l’immigration et sur la façon de faire reconnaître les compétences des immigrantes ici au Canada, et comment y parvenir.

Aleena Esmail : C’est une expérience très gratifiante dans le sens où vous n’aurez peut-être pas la chance d’expérimenter, vous savez, ou d’avoir tort sur quelque chose au début. Je pense donc que nous sommes tous très reconnaissants d’avoir eu l’occasion d’essayer et d’échouer.

David Morrison : Vous faisiez ça à plein temps ou...

Aleena Esmail : Non, un jour par semaine.

Andreia Santos : Oui. Et ce qu’il y avait de formidable, c’est qu’il y avait vraiment de la place à l’échec, mais ce n’était pas comme s’il s’agissait d’un échec intelligent, non? Nous en avons tiré des leçons. Et je pense que c’était aussi une expérience hors pair d’apprendre que vos échecs ne sont pas véritablement des échecs, mais des occasions de corriger le tir.

David Morrison : Donnez... donnez-nous un exemple de ce que signifiait l’échec dans ce contexte? Je veux dire, quel, comment saviez-vous que vous aviez échoué?

Andreia Santos : Voulez-vous parler de Winnipeg ou?

David Morrison : Attendez un peu. Que s’est-il passé à Winnipeg?

Andreia Santos : Avez-vous envie de parler? J’ai l’impression de parler beaucoup.

Roxanne Hamel : Poya a un bel exemple d’échec et....

Poya Saffari : Donc, Winnipeg a d’abord été un... à mi-chemin des neuf mois, nous avons eu l’occasion de nous rendre tous ensemble à Winnipeg. Nous avons passé quelques jours là-bas dans une sorte de... dans une conférence où nous avons eu l’occasion, en tant qu’équipes, de poursuivre notre travail d’une façon plutôt approfondie.

Roxanne Hamel : Et de sortir de la bulle d’Ottawa.

Poya Saffari : Oui, et de quitter Ottawa. Donc, je suppose que l’une des choses que nous avons faites en préparation pour Winnipeg a été de développer... c’est de développer des idées, comme nous les appelons, en nous basant sur notre travail de prévision et sur notre type de. Essentiellement, au début, nous nous tournions vers l’avenir, nous examinions, nous cherchions des signes de ce qui se passait dans chacun de nos domaines. Quels étaient certains des défis et certaines des possibilités qui se présentaient? Quelles étaient les choses à venir? C’est ainsi que mon équipe qui travaille à la réconciliation a généré ces idées. Nous, je pense que depuis le début, nous avions le sentiment de ne pas bien comprendre, néanmoins, nous avons trouvé certaines idées sur ce à quoi les choses pourraient ressembler dans 10 ou 15 ans. Et nous avons développé ces connaissances. Et lorsque nous sommes arrivés, nous avons rencontré les intervenants à Winnipeg. Donc, je suppose qu’une petite mise en garde aussi, c’est que nous... nous n’avions pas vraiment l’intention de les considérer comme des intervenants, mais dès le départ, nous avons adopté une approche où nous les considérions comme des partenaires.

David Morrison : Exactement.

Poya Saffari : En tant que personnes avec qui nous devions développer quelque chose. Quand nous sommes arrivés, nous avions des idées, mais nous étions ouverts à l’idée qu’ils allaient avoir des points de vue différents.

David Morrison : Détruire vos idées.

Poya Saffari : Exactement et c’est exactement ce qui s’est passé. Et l’une des choses les plus poignantes qu’ils nous ont dites, c’est que vous tentez de voir ce qui se passera dans 10 ou 15 ans. On n’a même pas encore résolu, vous savez, ce qui s’est passé il y a 150 ans. Par conséquent, vos intentions sont donc un peu mal placées dans cette situation. Nous devons d’abord examiner le passé et le présent avant même de pouvoir nous diriger vers l’avenir. Cela montre donc à quel point un regard prospectif, ce n’est pas dans tous les contextes et dans toutes les situations que ce genre d’approche convient.

David Morrison : Donc, vous avez tous... vous avez tous en quelque sorte vécu une sorte de dérapage et vous avez ramené... vous avez ramené le train sur ses rails. Je constate, c’est un balado, donc vous ne pouvez pas voir, mais je vois beaucoup de hochements de tête.

Andreia Santos : Absolument!

David Morrison : Vous savez, on dit souvent que nous apprenons plus de nos échecs que de nos... que de nos succès. C’est probablement une bonne chose. D’un point de vue personnel, ces outils avec lesquels vous avez travaillé, le regard prospectif, la réflexion conceptuelle et la co-création, s’agit-il de nouvelles notions? Sont-ils.... je veux dire sans... nous n’aurons pas le temps de nous étendre sur ces trois concepts, mais ont-ils été utiles?

Roxanne Hamel : C’est un peu la dernière mode ou l’avant-dernière mode du développement politique. Je peux parler un peu de la cocréation… pour nous la cocréation on a appris un peu à la dure qu’est-ce que ça qu’est-ce que ça voulait dire. Je travaillais, comme j’ai dit plus tôt sur l’avenir du travail. Ça nous a pris beaucoup de temps à essayer de définir c’était quoi exactement le problème avec l’avenir du travail. Je pense que tout le monde ici dans la salle aurait une définition différente des défis à venir dans le monde du travail, puis c’est un peu ce qui s’est passé pour nous aussi, ça nous a pris des semaines avant d’arriver à un problème qu’on voulait résoudre, chacun avait des vues différentes. Ensuite quand on a présenté c’était le problème qu’on avait identifié c’était ce qu’on appelle le gig economy, la montée du travail à contrat, moins d’emplois stables. Ensuite, on a voyagé à Winnipeg, on a rencontré nos intervenants qui étaient dans ce cas-ci des agences d’emplois, puis des gens qui travaillent dans le monde du travail à Winnipeg, puis on leur a exposé notre problème en essayant de travailler avec eux pour trouver des solutions. Ce qu’ils nous ont dit, c’est que pour eux le concept de gig economy ça voulait rien dire parce que de toute façon Winnipeg étant surtout des travailleurs… c’est une ville de travailleurs, pas beaucoup d’emplois de bureau, tout le monde travaille déjà à contrat. Donc, là on s’est rendu compte que bon okay on ne peut pas définir notre problème tout seul d’Ottawa, nous jeunes fonctionnaires avec une stabilité d’emploi incroyable, c’est pas nous qui allons définir c’est quoi le problème avec l’avenir du travail. Donc, on a décidé de plutôt que de définir le problème puis d’aller ensuite parler à nos intervenants, on allait tout simplement couper l’étape du définition de problème, aller voir nos intervenants puis le demander eux qu’est-ce qui pense, qu’est-ce qui va se passer dans l’avenir du travail, qu’est-ce qui ne marchera pas, puis comment, qu’est-ce qu’on doit résoudre? Puis en fait, c’est donc, je reviens au concept de la cocréation, que c’est pas l’engagement ou les consultations traditionnelles où on prépare un document ou un dossier ou une solution politique, puis on présente ça à nos intervenants. C’est vraiment de développer la politique dans l’ensemble de A à Z avec nos intervenants. Puis pour nous ç’a été vraiment une leçon et un succès.

David Morrison : C’est en quelque sorte la deuxième fois que je vous entends dire que l’une des leçons que vous avez retenues, c’est que vous avez réussi à faire participer les autres très rapidement. Et à mon avis, je pense que c’est... c’est ce qui est également vrai ici, aux Affaires mondiales. Une consultation, cela ne signifie pas que vous faites votre propre travail et que vous vous passez ensuite la feuille pour un après-midi et que vous obtenez des commentaires. En fait, ça veut dire qu’on commence au début et qu’on y travaille, vous savez, ensemble. La définition du problème devient super importante, mais notre système aux Affaires mondiales, mais il est reproduit à l’échelle du gouvernement ne se prête pas à cela, n’est-ce pas? Parce que tout le monde a des responsabilités verticales plutôt que des incitatifs à travailler horizontalement. Cependant, deux d’entre vous ont dit que l’un de vos apprentissages est que, vous savez, si vous... si vous voulez un, vous savez, c’est le vieux proverbe que j’ai utilisé dans la baladodiffusion précédente, « si vous voulez y aller rapidement, allez-y seul. Si vous voulez aller loin, allez-y ensemble » et vous devez commencer par y aller ensemble. Il semble... sur la question de vos groupes de travail et de la diversité au sein de ces groupes de travail. Comment cela s’est-il déroulé par rapport à ce que vous avez appris les uns des autres?

Aleena Esmail : Ayant commencé ma carrière à Affaires mondiales Canada, je n’ai jamais travaillé dans d’autres ministères. C’était une expérience extrêmement enrichissante de pouvoir travailler avec des gens de différents ministères. J’ai beaucoup appris sur ce que les gens font, vous savez, en Colombie-Britannique ou même dans d’autres ministères au Canada. Cette expérience a donc été... eh bien, je pense que l’expérience de chacun est très différente et le fait de pouvoir examiner un problème à travers autant de perspectives est assez unique.

David Morrison : J’ai aussi vécu cette expérience très récemment, bien qu’à un stade beaucoup plus avancé de ma carrière. Beaucoup.... Je pense qu’à Affaires mondiales, nous pouvons perdre de vue le fait que de nombreux ministères fournissent des services directement aux Canadiens. En fait, ils traitent directement avec les clients et représentent le visage du gouvernement fédéral. À l’exception de la zone consulaire où vous avez commencé, il n’y a pas d’activités commerciales où vous traitez directement avec les entreprises. Nous sommes plutôt éloignés des Canadiens que nous servons en fin de compte. Et c’est... c’est ce que fait le reste du gouvernement... c’est une chose dont tout le monde doit tenir compte, et je pense que tout le monde à Affaires mondiales doit tenir compte des normes auxquelles il est assujetti.

Andreia Santos : Et nous avons tellement de choses, je pense qu’à Affaires mondiales, nous avons tendance à regarder vers l’extérieur pour trouver les réponses, mais nous avons tellement de réponses dans notre propre cour arrière. Par exemple, je me souviens d’avoir travaillé sur des questions touchant les jeunes, par exemple, du côté du développement, puis d’avoir rencontré un collègue qui travaillait au Programme du travail et d’avoir pensé qu’il y avait cette... Que cette personne travaillait sur ces questions précises et avait un savoir-faire incroyable, je les aurais, vous savez, aussi consultés au lieu de toujours regarder vous savez vers les intervenants externes. Je pense donc que parfois, nous n’apprécions tout simplement pas la richesse de l’expérience que nous avons dans notre propre arrière-cour. Et je pense que j’ai développé ce réflexe de consulter mes collègues des autres ministères beaucoup plus qu’avant de venir... avant de participer à ce projet. Et je pense aussi que cela m’a fait réfléchir à l’une des autres leçons vraiment puissantes que j’ai tirées de l’expérience en ce qui a trait à la diversité des intervenants. Par exemple, nous travaillions sur le gouvernement féministe et sur des questions relatives au gouvernement féministe, mais nous avons réuni une diversité d’intervenants qui n’étaient pas nécessairement des experts en matière de féminisme, de gouvernement féministe, mais qui nous ont vraiment fait réfléchir et qui nous ont permis de démêler tant de nos points faibles comme de penser à ceci ou à cela, vous savez. Un architecte, par exemple, nous a simplement dit que les bâtiments ont besoin de salles d’allaitement. Il s’agit de choses auxquelles nous ne pensons tout naturellement pas lorsque nous... lorsque nous parlons à... nos experts sur les femmes, sur les gouvernements féministes. Et je pense que c’est comme si j’avais un, si vous savez si vous travaillez sur un projet concernant les réfugiés, et que vous appelez un expert en environnement, parce qu’il vous parlera des réfugiés environnementaux, que vous appelez un architecte parce qu’il vous dira comment construire un bon camp ou un système ou peu importe. En effet, la diversité des intervenants et la diversité au niveau des idées font vraiment une différence en termes de conception de programmes et de politiques.

David Morrison : La ministre des Affaires étrangères, Chrystia Freeland, a participé récemment à une sorte de consultation et a été informée qu’une des choses qui serait utiles pour une approche féministe de la politique étrangère, mais aussi pour le ministère, c’est la disponibilité de produits d’hygiène féminine dans tous nos établissements.

Roxanne Hamel : Oui.

David Morrison : Dans toutes nos toilettes du monde entier.

Roxanne Hamel : Est-ce que je peux ou au moins dans les distributeurs automatiques.

David Morrison : Oui, alors croyez-moi, elle s’est emparée de cette question et son sous-ministre et son sous-ministre délégué l’ont prise en compte et si elle écoute, je veux simplement qu’elle sache que nous faisons... nous sommes... nous sommes saisis de la question. Cependant, c’est... Je veux dire que je plaisante en partie, mais c’est une chose extraordinaire... extraordinairement puissante quand on consulte et qu’on pense qu’on va parler d’une grande politique et qu’on se retrouve avec quelque chose qui compte vraiment profondément pour... la vie des gens. Et lorsqu’on découvre que l’on détient les clés pour régler ce problème particulier, même si ce n’est pas le grand problème stratégique. Vous avez toutes partagé deux ou trois choses que vous avez apprises. Comment vous sentez-vous à propos de l’avenir? Êtes-vous, je veux dire, vous êtes tous, pour les auditeurs, que j’ai essayé de deviner leur âge avant qu’ils ne s’assoient et je n’ai pas obtenu beaucoup de succès. Nous avons donc opté pour cette ferme... cette notion de début de carrière. Comment vous sentez-vous au début de votre carrière? Au sujet des types de défis auxquels le Canada est confronté et du rôle que le gouvernement fédéral peut jouer pour aider à les relever? Grande question, mais....

Poya Saffari : Je veux dire, je dirais simplement que pour moi, ça dépend vraiment des problèmes dont nous parlons. De toute évidence, toutes les questions qui nous attendaient dans le cadre de ce projet... pour ce programme étaient incroyablement complexes et difficiles. Pour ce qui est de la réconciliation, je pense que c’était un peu bizarre dans le sens où c’était un... c’était un problème que nous, en tant qu’équipe, n’avions pas l’impression d’être équipés pour régler puisque nous sommes majoritairement non-autochtones. Et je vais aussi faire le lien avec votre question, à savoir que je pense que l’un de nos plus grands défis en matière de réconciliation, en particulier, est de donner aux peuples autochtones la possibilité de s’exprimer pour vraiment relever ces défis d’une façon significative aux côtés du gouvernement fédéral, par l’entremise du gouvernement fédéral. Et je pense que nous avons encore beaucoup de chemin à parcourir dans ce domaine. Toutefois, mon expérience m’a en quelque sorte fait comprendre que ce n’est pas parce que nous étions là que nous avons été confrontés à ce problème complexe, mais d’une certaine façon, nous n’étions peut-être pas les bonnes personnes.

David Morrison : Exactement.

Poya Saffari : Et je pense que c’était une leçon et peut-être qu’en allant de l’avant, on pourrait semer un peu...

David Morrison : Une bonne leçon à apprendre. D’autres optimistes, pessimistes?

Roxanne Hamel : Je ne sais pas. J’ai des sentiments mitigés. Je pense que nous sommes encore en train de déterminer ce que nous voulons pour le Canada dans l’avenir. Et même si l’on met beaucoup l’accent sur l’avenir de notre main-d’œuvre, sur la prochaine génération, nous avons un premier ministre qui est tellement enthousiaste à l’égard des questions touchant les jeunes et les féministes. Pendant que nous déterminons ce que nous voulons, faisons-nous.... consacrons-nous autant d’énergie à... définir les principaux enjeux qui se poseront au Canada dans l’avenir? Et vous savez, les changements climatiques sont importants, mais il y a des problèmes majeurs auxquels sont confrontés non seulement le Canada, mais d’autres d’autres pays. Et franchement, je suis un peu inquiet. Et je pense que c’est en partie parce que je suis aussi une mère. Je ne sais pas à quoi ressemblera le monde pour mon petit garçon, mais j’espère que... j’espère que plus... plus de gens... peuvent regarder, avoir une approche prospective en matière d’élaboration de politiques.

David Morrison : Permettez-moi donc de modifier la question... juste un petit peu. Lorsqu’Ian Shugart est devenu sous-ministre, l’un de ses premiers jours ou l’une de ses premières semaines, il a dû faire un discours à tous nos chefs de mission qui étaient réunis ici à Ottawa et il a utilisé la phrase à laquelle j’ai beaucoup réfléchi depuis sur les politiques. Il a dit quelque chose comme : « Les politiques constituent la réponse à la question, que ferons-nous pour régler ce problème? » Et quand je... je veux dire que je partage votre, il y a des problèmes vraiment délicats dans le monde. Les changements climatiques en représentent un bon exemple, qui est en fait existentiel, n’est-ce pas? Je regarde l’IA. Vous savez qu’il y a de grandes choses qui s’en viennent, un grand potentiel sur le plan positif, un grand potentiel ou une grande prudence sur le plan négatif. Et pour tout ce qui est cybernétique, ce serait pareil. Vous savez, il n’y a pas si longtemps, le cyber semblait être la réponse à tout. Et maintenant, il s’agit d’une chose contre laquelle nous essayons de nous protéger. Donc.... la version modifiée de la question que j’aimerais vous poser est la suivante : êtes-vous optimiste en raison de votre expérience de l’expérimentation et de ce genre de conception stratégique? Donc, même si vous ne pouvez pas, même si certaines des questions sont vraiment très importantes et difficiles... Croyez-vous, avez-vous des raisons de croire que l’approche que vous avez adoptée est prometteuse pour ce qui est de contribuer à résoudre certains de ces problèmes?

Aleena Esmail : Si je peux répondre à cette question, je ne suis pas certaine si je vais nécessairement parler des procédures que nous utilisons, mais plutôt des personnes que nous avons rencontrées et avec lesquelles nous avons travaillé. Vous savez que nous avons des méthodes différentes et que nous avons des idées différentes, vous savez, sur la façon d’aborder différents problèmes et que celles-ci changeront toujours en fonction de la nature du problème. Mais après avoir travaillé avec environ 80 de ces formidables fonctionnaires en début de carrière, je suis inspirée, vous savez. J’ai tant appris, je pense, vous savez, de la détermination de ces gens à s’attaquer à ces problèmes. Vous savez que la passion que j’ai vue est un très bon signe de la façon dont nous pouvons nous attaquer à ces problèmes à l’avenir.

David Morrison : D’autres?

Andreia Santos : Je le referais volontiers. J’ai tellement confiance en l’avenir de la fonction publique. Je veux dire que ce sont des gens très avisés et très engagés qui sont vraiment passionnés par ces grands enjeux et.... et qui s’investissent dans leurs dossiers. Je pense donc que seule, la volonté sincère de faire du Canada au-delà de 150 un endroit meilleur pour nous tous est ce qui me maintient, c’est ce qui me donne de l’espoir. Oui. Je me sens vraiment revigorée par tous mes collègues du programme. Absolument.

David Morrison : Poya?

Poya Saffari : Non, je veux dire que je ferais certainement écho au même... au même sentiment. Je pense que lorsque j’ai vu pour la première fois la demande pour le programme et que j’ai vu ces thèmes, j’étais un peu émerveillé, mais je ne m’attendais pas vraiment à voir l’occasion de travailler sur ces choses qui me tenaient beaucoup à cœur. C’était donc en soi très encourageant pour moi. J’étais un peu, vous savez, ça m’a juste réchauffé le cœur de savoir que vous savez que nous avons eu l’occasion de travailler sur des choses qui nous tenaient à cœur. Et je pense que c’est ce que tout le monde dit, comme si nous avions amené des gens à la table qui s’en souciaient vraiment.

David Morrison : Exactement.

Poya Saffari : Et je pense que c’était une... c’était une surprise pour moi d’une certaine façon, une très bonne surprise.

David Morrison : Vous savez que je vais aussi manquer de temps, mais vous savez, l’une des choses qui m’intriguent, c’est le modèle d’une journée par semaine. Vous savez, Google a été le pionnier du modèle des 10 pour cent où si vous aviez une idée géniale, vous pouviez y consacrer 10 pour cent de votre temps. C’est ce qui a permis de créer Google Maps, c’est ce qui a permis de créer Google Earth, vous savez, parce que ce sont en fait les gens qui travaillent de façon décentralisée qui peuvent en quelque sorte voir des choses que les entreprises ne voient pas. Je veux donc accorder le dernier mot à Roxanne. Juste une réflexion globale sur cette méthode d’expérimentation et le Canada au-delà de 150.

Roxanne Hamel : Je crois qu’une journée par semaine c’était, c’était un modèle qui était intéressant. Je crois que ça a bien fonctionné pour certains d’entre nous, moins bien pour d’autres, dépendamment de notre charge de travail. Bien dans tous les cas, je pense que ça nous a tous permis d’explorer des sujets, d’explorer des processus qu’on n’aurait pas autrement eu la chance d’apprendre ou sur lesquels on n’aurait pas pu autrement travailler. Donc, je crois, dans l’ensemble c’était une expérience qui était extrêmement enrichissante pour tout le monde au programme, puis on est resté vraiment avec un réseau, un réseau de contacts très fort, on a appris à travailler avec des outils fantastiques pour améliorer notre travail ici à GAC, puis on espère que ça va nous permettre en fait de mieux de contribuer à GAC d’une manière d’une manière significative.

David Morrison : Et pour terminer, une dernière question, vous arrive-t-il de vous amuser ou est-ce que ce qui se passe à Winnipeg reste à Winnipeg?

Aleena Esmail : Nous avons créé des amitiés très étroites avec les gens avec qui nous avons travaillé. Oui, nous allons faire une fête de Noël la semaine prochaine.

Andreia Santos : Beaucoup de ces gens sont mes mentors maintenant, donc.

David Morrison : D’accord.

Andreia Santos : Pouvons-nous simplement féliciter Alyssa d’être la championne du programme Le Canada au-delà de 150?

David Morrison : En ce qui me concerne, tu peux toujours féliciter Alyssa.

Andreia Santos : Oui, et elle a joué un rôle important en nous donnant des conseils et en se faisant vraiment notre championne.

David Morrison : Eh bien, Alyssa est un exemple de quelqu’un qui se soucie profondément de ces questions et du pouvoir du gouvernement et de gens passionnés d’apporter de véritables changements. Poya, Andreia, Roxanne et Aleena, merci d’être venus. Continuez votre bon travail.

Andreia Santos : Je vous remercie!

Aleena Esmail : Merci.

Roxanne Hamel : Merci.

Poya Saffari : Merci de nous avoir invités.

Date de modification: