Transcription – Épisode 24 : Entretien avec Antoine Pouliot
David Morrison : Antoine Pouliot travaille dans le domaine de l’appui aux missions à Affaires mondiales Canada où il élabore des programmes sur la diplomatie culturelle. Sa vie avant AMC comprend des périodes de travail dans une agence de publicité et des fonctions d’imprésario dans le cadre d’un grand évènement pour les jeunes qui a eu lieu à Ottawa : One Young World. Récemment, Antoine est passé ici dans le cadre des dossiers d’AMC pour nous parler de sa famille à Québec, notamment sur la façon dont la maladie de son père a façonné sa propre vision de la vie et sur ce qu’il a appris dans le secteur privé qui s’applique à ce qu’il fait maintenant à AMC. Antoine Pouliot, c’est un plaisir de te voir. Tu travailles à l’Appui aux missions, ici à l’Administration centrale d’Affaires mondiales Canada, pour la défense des intérêts et la diplomatie culturelle. Nous allons donc en reparler un peu plus tard. J’aimerais commencer par la ville de Québec où tu m’as dit que tu avais grandi dans un milieu bilingue, mais que vous étiez considérés comme des anglophones parce que vous parliez anglais. Parle-moi de ton expérience familiale à Québec.
Antoine Pouliot : Absolument. Tout d’abord, merci beaucoup de me recevoir sur le balado David. Je pense que ce balado est quelque chose de vraiment spécial pour le ministère pour ce qui est de raconter nos histoires l’un à l’autre, mais aussi pour les Canadiens au sens plus large. Oui, j’ai grandi à Québec dans un petit endroit appelé l’île d’Orléans. J’ai été adopté et j’étais enfant unique et je suis arrivé dans une famille qui, ouais, qui entretenait une relation forte avec le Saint-Laurent et la navigation. Donc, ouais, mon père était pilote sur le Saint-Laurent. Et ma famille avait une sorte d’historique qui remontait, je crois, je suis le premier homme en quatre générations qui ne devient pas pilote ou capitaine de bateau ou quelque chose du genre. Nous avons quelques-uns de mes cousins qui perpétuent la tradition et elle se maintient. Mais c’est une profession extrêmement intéressante.
David Morrison : Aide-nous parce que je trouve cela extraordinairement cool. La profession, ou ce que ton père et ton grand-père faisaient, ils étaient pilotes donc les bateaux arrivaient dans le Saint-Laurent et à un certain endroit ils embarquaient sur un remorqueur ou ils allaient traverser un pont ou comment ça marche?
Antoine Pouliot : Ouais, ouais, alors ils grimpent sur une échelle de corde dans toutes sortes de conditions météo. Aujourd’hui parfois, c’est une passerelle. Le jour ou la nuit, sous la pluie, le grésil, la neige et bien plus encore, puis ils agissent comme conseiller auprès du capitaine à bord du bateau et en quelque sorte ils aident en partageant leurs connaissances locales de ce segment du fleuve en particulier. Il est très difficile de naviguer ces segments du fleuve et tellement de produits expédiés dans le monde passent par ici. Donc tu as vraiment une idée, même si cela se déroule dans ta cour, de comment le monde est relié.
David Morrison : Est-ce qu’ils travaillent tous ensemble? Ou ils travaillent à leur propre compte? Y a-t-il, tu sais, si j’ai une cargaison à exporter du Canada à partir des Grands Lacs et que je dois passer par ce segment dangereux du fleuve, est-ce que j’appelle ta famille?
Antoine Pouliot : Il existe différentes autorités selon le segment du fleuve avec environ 50 à 100 pilotes plus ou moins qui se spécialisent pour un secteur donné et ils se passent le relais à mesure qu’ils descendent le fleuve.
David Morrison : Oui, okay. Et tu m’as dit que quand ton père était déjà jeune en fait il y avait, ce n’était pas un accident, mais il avait une hémorragie cérébrale. Et que s’est-il passé, il n’a pas pu continuer à travailler?
Antoine Pouliot : Oui, absolument, oui, mon père avait cinquante-deux ans quand il a fait un AVC assez sévère. C’est vraiment sorti de nulle part puis suite à ça il a perdu la parole, puis il a eu une paralysie partielle, il marchait avec difficulté, il a perdu l’usage d’un bras. Pour nous ça a été un choc bouleversant, c’est le genre de chose qui peut arriver d’un jour à l’autre puis tout d’un coup ta vie est très très différente, mais je pense.
David Morrison : T’avais quel âge toi?
Antoine Pouliot : J’avais quatorze ans.
David Morrison : Oui.
Antoine Pouliot : Oui, oui. Mais, non, passé à travers tout ça, ça été toute une expérience qui permet vraiment de concevoir une empathie très très différente je dirais la notion de résilience et de soin aussi et cela n’affecte pas qu’une seule personne, elle affecte toute la famille.
David Morrison : Toute la famille, bien sûr.
Antoine Pouliot : Donc ma mère s’occupe de lui depuis et donc, oui, ils sont vraiment un bel exemple de courage et de détermination je dirais même dans le sens que mon père ne peut pas parler, mais nous sommes capables de tenir une conversation juste en étant expressifs. Et c’est surprenant à quel point vous pouvez échanger de cette manière. Donc on apprend à devenir très patient, mais aussi dans le cadre d’une récupération comme celle-là on apprend également à devenir vraiment impatient d’une certaine façon et on travaille très très fort pour avoir ce que l’on veut. Mais je pense qu’en revenant de tout ça, on en sort avec un sentiment que la vie est très, très courte et que l’on se doit d’être très conscient sur la façon dont on occupe son temps et.
David Morrison : Alors c’est ainsi que tu as démontré que ta propre résilience c’est...
Antoine Pouliot : Absolument!
David Morrison : ... c’est essayer de le vivre, il me semble.
Antoine Pouliot : Ouais. Ouais.
David Morrison : C’est intéressant ce que différentes personnes représentent et ce qu’elles nous disent avant de venir à ce balado et je voulais creuser un peu le sujet parce qu’il est évident que l’expérience familiale a évidemment façonné la personne que tu es devenue. Tu as décidé quatre ou cinq ans plus tard, je crois, de déménager à Ottawa pour y entreprendre tes études universitaires et ensuite travailler au Parlement. Est-ce qu’Équipe Commerce Canada était ton premier lien avec ce ministère?
Antoine Pouliot : Ouais, absolument. Donc il existe un organisme appelé Vision internationale, qui mène un programme appelé Équipe Canada Junior inspiré de l’ancien modèle des missions d’Équipe Canada. Et ce programme existe depuis un certain temps maintenant, il a débuté en 1991 alors que la mondialisation en était à un stade différent de celui d’aujourd’hui et où international n’était pas le mot à la mode. Mais lorsque le Canada a réalisé en quelque sorte que s’il allait être une économie qui allait jouer sur la scène internationale il allait devoir embaucher de jeunes personnes parce que nous sommes une jeune nation commerciale dans ce sens. J’ai donc eu la chance quand j’avais 17 ans de prendre part à une mission commerciale dirigée par des jeunes au Brésil, une expérience qui m’a grandement ouvert les yeux.
David Morrison : Tu étais à l’Université d’Ottawa?
Antoine Pouliot : Je n’y étais pas encore. Je sortais tout juste de l’école secondaire en fait, sur le point d’aller au CÉGEP et cela m’a vraiment ouvert... ouvert les yeux. C’est un formidable... un formidable programme et je pense que le point le plus, le plus marquant est que sa fourchette d’âge est très étendue. La fourchette va de 17 à 30 ans, mais certaines des personnes les plus, les plus importantes étaient parmi les plus jeunes et nous avions accès à certains leaders formidables et des salles et des cadres supérieurs de la finance ou de l’industrie agricole, une panoplie de différents pilotes que l’on ne voit pas nécessairement comme des clients, mais qui sont vraiment, vraiment de gros et importants joueurs économiques. Et de réaliser que même si on a que 17 ans, on peut être assis de l’autre côté de la table et avoir un certain niveau de crédibilité et parler des affaires de sa partie du Canada, de sa communauté qui cherche à exporter sur la scène mondiale est quelque chose de vraiment spécial. Et je pense qu’une autre fois, j’ai fini par travailler avec eux quelques années plus tard, j’ai donc participé à plusieurs missions commerciales et sommets avec eux. Mais je pense que... que ce qui est vraiment intéressant c’est travailler avec les missions, parce que les missions à plusieurs endroits quels meilleurs ambassadeurs pour les messages et les valeurs qui compte pour le Canada que d’envoyer nos jeunes à l’avant-plan.
David Morrison : Mais tu avais aussi l’occasion, je crois, de voyager pas mal ici au Canada.
Antoine Pouliot : Oui tout à fait.
David Morrison : Tu m’as dit que de connaître ton propre pays c’est presque primordial d’être un représentant efficace. Tu as parcouru le Canada?
Antoine Pouliot : Ouais, ouais j’ai été très chanceux dans ce programme. Une grosse partie du travail que l’on faisait était d’aller d’un bout du pays à l’autre, encore et encore. Donc, nous sommes allés partout, y compris dans le Nord parce que ouais, il y a des histoires incroyables à raconter dans l’ensemble ou à travers tout notre pays. Beaucoup de gens du Sud ne vont pas dans le Nord et ils ne voient pas que c’est une vie très, très différente de celle que l’on vit dans le Sud. Mais partout au Canada, il était très intéressant de voir toutes ces personnes incroyables, incroyablement talentueuses qui dirigent déjà leurs entreprises, qui signent déjà peut-être des contrats à l’étranger à 21 ou 22 ans, ils se présentent déjà pour diriger leurs propres communautés que l’on... c’est ce que l’on peut voir là-bas. Et je pense que c’est quelque chose qui est dû à la nature de notre travail où il existe un certain niveau de hiérarchie et du temps passé dans un système comme le nôtre, il est très intéressant de voir comment les jeunes sont actifs à un certain âge.
David Morrison : Tu as abandonné l’entreprise familiale en ne devenant pas un capitaine de bateau ou un pilote. Tu fais des choses pas mal intéressantes déjà à Ottawa et autour de la politique publique, la fonction publique. J’ai peut-être... je n’ai peut-être pas le bon ordre, mais c’est parce que je veux parler de One Young World et qu’une partie de ton expérience, mais pendant un certain temps tu étais partenaire dans une agence de publicité.
Antoine Pouliot : Ouais, c’était toute une aventure extraordinaire.
David Morrison : Dis, alors... c’est une expérience réelle dans le secteur privé où tu avais des obligations salariales et devais rechercher des clients et ainsi de suite. Parle-nous-en donc un peu.
Antoine Pouliot : Ouais, absolument. J’étais un... j’ai quitté Ottawa pendant un petit bout de temps tandis que je travaillais à Toronto pour une organisation appelée Global Citizen dans le domaine du développement international et à mettre sur pied le mouvement pour lutter contre l’extrême pauvreté en s’engageant avec les gouvernements et les entreprises et les mouvements citoyens. Et j’ai eu l’occasion de revenir et de travailler avec de bons amis à moi dans une agence nommée Jack Pine. Et Jack Pine était un modèle très intéressant et une idée très radicale sur la manière de structurer une entreprise créative de la sorte, où ce qui comptait était de mélanger diverses visions très, très créatives ensemble. Des gens avec différents parcours de vie, différentes professions, plutôt que d’avoir uniquement des graphistes et des gens qui ont étudié en marketing, mettre ces personnes-là ensemble et creuser dans la culture émergente et recueillir des renseignements qui allaient être utiles à l’entreprise dans ses prises de décision. Nous avons donc fait de la conception, de la valorisation de la marque, toutes ces différentes choses en travaillant dans beaucoup de disciplines différentes, un peu d’urbanisme, un peu de design d’espace. Nous avons conçu des restaurants, nous avons travaillé avec des pistes de course automobile, nous avons travaillé avec des hôtels et des promoteurs et des associations professionnelles, tous ces différents types de clients, des entreprises très, très différentes pour lesquelles nous n’étions pas nécessairement des experts dans leur domaine. Ce dans quoi nous étions experts c’était un processus, rassembler des personnes créatives et les guider étape par étape dans un processus de compréhension pour ensuite recueillir des renseignements créatifs qui seraient utiles pour les entreprises.
David Morrison : Alors qu’est-ce que tu as? Je veux dire, je suis vendu. Je t’engagerais. Qu’est-ce... qu’est-ce que tu as, pourquoi as-tu fait ça? Et dans ce que tu as appris, à quoi repenses-tu encore? Parce qu’en fait c’est et je sais que tu n’as pas fait cela très longtemps, mais c’est vraiment assez rare parmi les fonctionnaires d’avoir une expérience où ils subissent une pression pour vendre. Tu sens la pression des obligations salariales. Ou peut-être que je... peut-être que je me trompe... peut-être subissais-tu différentes pressions, mais que retires-tu de toute ton expérience?
Antoine Pouliot : Ouais, absolument. Bien je pense que tout d’abord ce qui... ce qui... ce qui m’a amené... à travailler là était d’apprendre, n’est-ce pas! Et je pense que pour la période où en quelque sorte je terminais l’université était juste après la crise financière. Il y avait un grand sentiment au sein de notre cohorte dans ces années-là. J’ai obtenu mon diplôme de baccalauréat en 2011. Mais il y avait vraiment un sentiment que l’on allait devoir prendre notre propre carrière en mains et que nous allions devoir avoir un meilleur sens de l’entrepreneuriat. Nous devions foncer et acquérir des expériences vraiment... vraiment uniques pour nous distinguer. Et alors cette expérience était très intéressante, mais vraiment je... ce que j’en ai retiré vraiment c’est de diriger une entreprise. J’y étais le vice-président. Nous avions une équipe de 12 employés à temps plein en plus de quelques pigistes. Ouais, réagir sur-le-champ, résoudre les problèmes, puisqu’ultimement c’est toi le responsable. Donc si tu affrontes un problème ou une difficulté tu devras être celui qui résoudra vraiment le problème et tu dois le faire rapidement. Et donc si tu deviens vraiment, vraiment créatif tu deviens vraiment, vraiment sans crainte parce que tu dois simplement continuer. Mais c’était toute une partie de plaisir. C’était une folle aventure. Je me souviens que le premier projet que j’ai réalisé la journée où j’ai déménagé à Ottawa c’était que nous... nous avons conçu et construit un restaurant en sept jours et j’ai reçu un appel dans le camion de déménagement pendant que je déménageais à Ottawa pour m’annoncer que j’allais être la... la personne qui allait gérer le projet. Et tellement, ouais, tellement d’expériences du genre. C’est un peu comme une sorte d’étrange MBA du monde réel où même après avoir fait pas mal de choses c’était probablement l’un des... des plus grands défis que j’ai.
David Morrison : Que tu as relevé.
Antoine Pouliot : Ouais.
David Morrison : Passons donc à One Young World. J’ai quelques photographies devant moi du jeune Antoine avec le premier ministre, avec Cher. Il y a donc un peu d’extravagance dans ce jeune homme. Et ce que tu m’as dit c’est... je veux dire, il y a une photographie extraordinaire avec la Tour de la Paix en arrière-plan, mais ce que tu m’as dit c’est que c’était la première fois que la pelouse de l’édifice du Centre était utilisée pour une autre occasion que la fête du Canada. Alors qu’est-ce... qu’est-ce qu’est ou était One Young World et quel était ton rôle?
Antoine Pouliot : Absolument. Donc One Young World est un forum qui réunit les grands, les très grands jeunes dirigeants de partout dans le monde et pratiquement de tous les domaines. Et nous avons travaillé en tant que groupe à Ottawa, en partenariat avec le maire Watson, en partenariat avec tourisme Ottawa, dans le but d’amener le tout à Ottawa. Jamais il n’avait eu lieu au Canada auparavant. Et nous avons remporté ce pari. Nous avons battu deux assez grandes villes asiatiques ayant de plus grands bassins économiques qu’Ottawa pour y arriver. Et nous y sommes arrivés en partie grâce à l’histoire des jeunes de notre ville et comment ils sont tellement au cœur des grands changements qui se déroulent, que ce soit au gouvernement, que ce soit dans les technologies, que ce soit dans les affaires publiques ou l’espace politique, l’espace civil, l’urbanisme, etc. Et donc One Young World les rassemble. Nous avions des jeunes dirigeants de cent quatre-vingt-quatorze pays, ce qui est très spécial en soi. Il n’y a que les Olympiques qui rassemblent...
David Morrison : Et il n’y a que cent quatre-vingt-treize membres à l’ONU.
Antoine Pouliot : Exactement. Exactement. Nous les avons donc rassemblés et nous les avons réunis avec... avec les dirigeants du monde. Nous avions donc le premier ministre Trudeau et le premier ministre du Conseil jeunesse comme partie importante de tout cela, mais nous avions aussi des dirigeants du monde et des dirigeants d’entreprise également. Donc, des personnes comme Kofi Annan, le professeur Muhammad Yunus, Mary Robinson et d’autres personnes du monde du divertissement très impliqué dans les répercussions et les causes sociales.
David Morrison : J’allais dire Cher n’est pas... Cher n’est pas jeune.
Antoine Pouliot : Ouais. Non, non, mais Cher fait... elle fait un excellent travail pour promouvoir l’environnement, la lutte contre les changements climatiques et les droits LGBTI. Et des personnes comme Emma Watson qui fait un superbe travail avec He for She. Et vous réunissez toutes ces personnes. Meghan Markel en faisait partie aussi. Mais au-delà de tout cela, ce qui aide c’est simplement de partager son histoire dans les médias et le fait que l’attention est... est une chose tellement importante dans notre monde occupé et bruyant d’aujourd’hui. Donc pour franchir les obstacles et parler de certains de ces problèmes sur une grande plateforme, tu dois avoir ce genre de dirigeants à la table. Mais vraiment, l’important c’était les jeunes personnes avec lesquelles ils étaient. Je veux dire Kofi Annan a amené un groupe de 10 exceptionnels, on pourrait les appelé des défenseurs des droits de la personne, mais des jeunes exceptionnels qui agissaient pour contrer la radicalisation et l’extrémisme violent, certains d’entre eux avaient de très, très formidables histoires personnelles. Je pense à certaines des jeunes femmes qui militent pour le droit des femmes au Moyen-Orient et le droit de conduire. Je pense au fondateur de la première organisation LGBTI en Iraq. Il est jeune... il a moins de 30 ans et alors vous rassemblez ces personnes et vous les réunissez avec des dirigeants d’entreprises, des dirigeants de gouvernements, avec des dirigeants de mouvements sociaux et des entreprises de technologies et vous les amener à travailler ensemble sur des solutions très, très concrètes pour certains de ces grands problèmes. Donc, c’était notre discours. C’est ce que nous avons fait. Et c’était ouais, c’était incroyable... Je pense que c’était une très bonne chose pour le Canada et une très bonne chose pour Ottawa aussi en tant que capitale. Et toute cette partie au sujet de notre rôle au Canada en tant qu’organisateur, d’amener des gens à la table pour tenir ces discussions. Et l’importance non seulement des discussions, mais des actions.
David Morrison : Ça sonne comme Davos, avec moins de cheveux gris.
Antoine Pouliot : Ouais.
David Morrison : Et après tout ça tu as rejoint le ministère proprement dit. Tu es arrivé il y a deux ans, je crois, et est-ce que tu travailles à l’appui aux missions depuis?
Antoine Pouliot : Ouais.
David Morrison : Donc nous nous sommes rencontrés quand j’étais SMA des Amériques. Tu as commencé sur sur un mandat et pour les auditeurs il y a une unité qui apparaît sur l’organigramme comme une partie de la Direction des Amériques, mais en fait c’est, elle fournit de l’aide à notre réseau de missions mondiales. Donc elle appuie toutes les directions géographiques en plus de la direction multilatérale, qui vient en aide à la mission, aux missions dans le système de l’ONU et ainsi de suite. Il y a aussi l’OCDE. Mais dans tous les évènements, il y a un groupe qui fournit les services essentiels et la planification et une sorte de gestion financière lorsqu’on en vient à l’administration de certains fonds, incluant le Fonds culturel dont je veux parler dans un instant. Mais as-tu répondu à une annonce d’emploi pour venir faire ce travail? Ou comment as-tu? Comment as-tu fait pour décrocher cet emploi?
Antoine Pouliot : Pas exactement. Et je... c’était je pensais... pensais à ce propos, vraiment je ne pense pas avoir déjà obtenu d’emploi par l’entremise d’une annonce, ce qui provient partiellement de mon expérience. Mais je pense que c’est aussi, cela parle de...
David Morrison : J’ai, tu sais ces annonces dans le magazine Economist? J’ai décroché des emplois avec ces dernières. Donc ça fonctionne.
Antoine Pouliot : N’importe quoi fonctionne.
David Morrison : Mais je t’ai interrompu. Dis-moi comment es-tu parvenu à entrer à AMC et obtenir ce type de poste?
Antoine Pouliot : Absolument. Alors, ce n’était pas prévu. Si tu m’avais demandé quelques années auparavant si j’allais finir ici, j’ai eu affaire au ministère à quelques reprises avant dans mon travail, mais je... la fonction publique n’était pas un désir naturel pour moi ni nécessairement ce ministère il y a quelques années. Et ce qui a changé c’est en partie la situation dans le monde et dans un sens, je pense qu’avec la manière dont les évènements mondiaux vont en se concentrant non seulement sur notre gouvernement, mais sur les mécanismes des relations internationales actuelles, nous allons avoir beaucoup de travail devant nous. Et je pense que la plus jeune génération devra en quelque sorte prendre... prendre la responsabilité et aller un peu plus loin que la génération d’avant. Tout comme moi quand je dirigeais One Young World. Mon rôle était donc d’y être le directeur du Canada. Nous étions basés à London et j’étais en quelque sorte la personne sur le terrain ici au Canada avec un personnel d’une personne et une incroyable équipe de volontaires et des partenaires à tourisme Ottawa. Mais vraiment c’était une assez... assez petite organisation agile. Et j’ai rencontré quelqu’un dans un festival de musique qui travaillait au Bureau du Conseil privé. Et nous étions à ce festival de musique qui avait toute une série de tables rondes sur la réconciliation et nous avons commencé à discuter après, nous avons tissé des liens et quand cette personne a appris que quelqu’un était à la recherche d’un employé, les astres se sont alignés pour moi en quelque sorte. C’est assez, je reconnais que c’est assez typique et j’ai été très, très chanceux que cette occasion se présente à ce moment particulier. Ouais.
David Morrison : Penses-tu que ce que tu recherchais avait aussi changé? Est-ce que tu pensais à long terme au sujet de chose comme la sécurité d’emploi? Je suis toujours fasciné par pourquoi tu sais, pourquoi nous arrivons aux choix que nous faisons. Tu as dirigé une boîte de publicité où tu étais un dirigeant dans cette boîte, tu as travaillé sur des projets vraiment plaisants, Cher et Kofi Annan ne travaillent habituellement pas avec Affaires mondiales. As-tu consciemment changé cette espèce de travail à haute visibilité pour la sécurité relative et le travail dans l’ombre d’Affaires mondiales Canada?
Antoine Pouliot : Je crois que c’est une question d’envergure. Ce qui est vraiment spécial ici c’est l’ampleur des répercussions qu’un organisme de notre taille peut engendrer. Même si nous sommes un pays de moyenne taille, nous pouvons engendrer des répercussions très importantes dans certains domaines très, très précis et c’est un peu ce qui m’a attiré. Et oui tout cela regroupé ensemble et j’ai moi-même ressenti cela parce que j’avais une sorte de vision externe et j’ai pensé que ce serait un bon choix. Ayant un bagage un peu différent, il n’y a pas de bagage normal ici. Mais oui c’était un peu différent ainsi. Et oui je voulais prendre cette décision en ayant une vision à long terme à l’esprit. Oui, j’aurai pu décrocher l’emploi, travailler quelques années puis retourner où j’étais avant si ça n’avait pas fonctionné. C’est correct. Mais au bout du compte je dirais qu’il y a beaucoup à apprendre dans ce domaine. Beaucoup à apprendre et cela demande beaucoup de temps. Donc tu dois...
David Morrison : L’ampleur de la plateforme a de l’importance.
Antoine Pouliot : Ouais, absolument. Absolument.
David Morrison : Et par-dessus tout, le Canada peut être un leader et c’est attrayant pour beaucoup d’entre nous. Tu as commencé pour un mandat, je t’ai rencontré à la cafétéria le jour où tu as obtenu ton contrat indéterminé, ou quand tu as signé un contrat indéterminé. Donc tu as maintenant la sécurité. Nous allons manquer de temps, mais j’aimerais en savoir plus sur la diplomatie culturelle qui semble être une passion pour toi.
Antoine Pouliot : Ouais, absolument. Donc nous... je suis arrivé en fait à un moment très intéressant et nous commencions à regarder la culture et la manière dont l’art canadien pouvait être utilisé comme plateforme de communication dans certains des plus grands enjeux de politique étrangère sur lesquels nous travaillons, d’une manière très, très rassembleuse. Donc une grande partie de notre travail consiste à défendre les intérêts, un domaine où il faut aider les missions à orienter et élaborer les tactiques qu’elles peuvent utiliser pour améliorer leur influence sur les décideurs, les influenceurs, etc. Et du côté culturel, je suis en quelque sorte en train de reconstruire les capacités et le coffre à outils des missions pour leur travail avec les institutions culturelles locales et les artistes canadiens pour faire une plateforme très, très unique pour tenir des discussions qui peuvent être difficiles parfois, concernant des enjeux vraiment, vraiment importants. Donc c’est une question d’aider les missions à obtenir un accès. Ça peut être une sorte de carte d’entrée en or quand un artiste canadien exceptionnel arrive en ville et parle d’un thème comme les droits LGBTI ou d’un art dans une situation d’après-conflit ou il y a de nombreux contextes différents dans lesquels cela peut se produire. Mais nous l’entendons sans cesse de nos chefs de mission qui sont vraiment, vraiment reconnaissants d’avoir cet outil pour rassembler les gens, parce que les contacts locaux y portent attention et dans beaucoup de parties du monde pour être considéré comme un joueur politique sérieux vous devez être actif dans l’espace culturel aussi. Alors c’est un peu ce que nous sommes en train de construire à l’heure actuelle. Il y a un aspect du commerce qui s’y rattache et nous travaillons étroitement avec le Service des délégués commerciaux, Patrimoine canadien et le Conseil des Arts du Canada. Mais en repensant à tout cela et je m’en voudrais de ne pas signaler que nous avons plusieurs employés incroyables qui sont vraiment, vraiment dévoués qui sont... sans qui reconstruire ce domaine dans lequel le ministère est actif aurait été impossible. Donc des personnes qui sont là depuis 20, 30 ans qui ont maintenu les contacts avec les institutions et qui nous ont permis de reconstruire le tout. Donc c’est une période vraiment, vraiment intéressante actuellement. Les soumissions arrivent avec des moyens vraiment, vraiment innovants de s’engager localement par l’entremise d’artistes canadiens et la culture, non pas de façon instrumentale, mais vraiment en l’utilisant comme une plateforme pour les échanges et la collaboration.
David Morrison : J’arrive tout juste la nuit dernière de Paris où le centre culturel, qui existe depuis des années, mais qui n’était pas connecté avec l’ambassade fait désormais partie de l’ambassade ou il est voisin en quelque sorte. On y entre par une porte commune, mais c’est un superbe modèle pour faire entrer les gens dans l’édifice et poursuivre toutes sortes de programmes comme... comme tu l’as dit. Dernière question Antoine, maintenant que tu as obtenu le contrat indéterminé que tu convoitais, qu’est-ce que tu recherches pour le futur? Vas-tu essayer de rester dans la diplomatie culturelle ou passer à autre chose?
Antoine Pouliot : C’est difficile à dire. Il y a tellement de défis intéressants sur lesquels nous travaillons en tant que ministère. Présentement il y a quelques superbes défis sur lesquels je travaille dans la culture et la défense des intérêts. Donc je suis... on m’a confié une très petite, mais très forte équipe pour travailler sur certains de ces enjeux. Donc en ce moment ma... ma priorité est de bâtir là-dessus et appuyer notre équipe de cette manière. Mais je pense qu’à long terme je reste ouvert à... à beaucoup de défis divers, qu’ils soient internationaux ou qu’ils soient ici. Il y a, je pense, beaucoup de discussions sur un changement de gestion concernant la manière dont notre travail évolue. Tu as présidé des missions sur les discussions futures, ce qui fait ressortir beaucoup de ces enjeux sur comment le monde change, comment nous changeons. Le ministère est maintenant une entreprise de technologie. Cela fait partie de notre travail. Mais oui, beaucoup de différents défis politiques et des personnes, un grand espace. Comment nous rassemblons les personnes, comment nous les formons, comment nous plaçons les bonnes habiletés aux bons endroits dans un travail qui évolue énormément. Ce sont des sujets intéressants. Ce sont des enjeux intéressants.
David Morrison : Ce sont là des questions intéressantes. Antoine Pouliot, c’était un plaisir… merci d’être venu et bonne chance.
Antoine Pouliot : Merci beaucoup David.