Transcription – Épisode 33 : Entretien avec Daniel Campeau

John Hannaford : Bonjour Daniel, c’est John Hannaford à l’appareil. Comment allez-vous?

Daniel Campeau : Je vais très bien, merci. Et vous?

John Hannaford : Oui, je vais bien. Je vais bien. Je vous remercie. C’est donc l’occasion d’avoir un entretien avec Daniel Campeau, de notre Programme d’aide aux employés, qui a une réelle expertise en matière de santé mentale et qui peut nous donner quelques conseils pour faire face aux circonstances extraordinaires que nous vivons tous en ce moment. Je devrais juste commencer par dire, est-ce que tu vas bien? Daniel, comment vas-tu? Et comment va votre famille?

Daniel Campeau : Merci de me le demander. Je vais bien, je vais bien. La fin de semaine dernière, ma quarantaine a pris fin. J’ai été en quarantaine pendant 14 jours parce que je revenais d’un voyage d’affaires, et ça s’est plutôt bien passé. Donc, pour l’instant, je suis sorti de quarantaine, mais je suis occupé et je continue à faire attention et à respecter ce que nos agences de santé et nos gouvernements nous demandent de faire.

John Hannaford : Bien. Mais évidemment c’est une situation assez difficile pour un grand nombre de nos collègues.

Daniel Campeau : Oui.

John Hannaford : Quel est votre avis dans cette situation? Quelles sont les stratégies plus efficaces dans ce contexte?

Daniel Campeau : Je dirais, en ce moment la première chose, la chose qui est nécessaire, importante, c’est de trouver le temps à chaque jour de maintenir des liens avec les gens que nous aimons et qui nous aiment. C’est-à-dire que ça soit des collègues, des amis, des membres de la famille, c’est utiliser les ressources technologiques à notre disposition, que ça soit Facetime, Skype, ou Microsoft Entreprise pour communiquer régulièrement avec des gens, parce qu’on me demande en ce moment, c’est vraiment inédit dans notre génération, dans les générations actuelles, et depuis un bon bout de temps dans l’histoire, qu’on nous demande de rester confiner et de s’isoler alors que nous avons toujours survécu à des grandes crises dans l’histoire en se regroupant, en étant ensemble. Donc, il faut en quelque part, tenter de gérer le mieux possible notre obligation d’isolement en restant en contact virtuel avec les gens.

Deuxième chose. Je pense que ce qu’il faut retenir, c’est qu’on nous demande de rester à la maison, parce que nous sommes confinés, parce qu’on nous a demandé de rentrer par avion au Canada, et ce n’était probablement pas notre choix. On nous a en quelque sorte volé notre sentiment de contrôle sur notre vie au cours de notre vie. Nous devons donc réfléchir à des moyens de retrouver ce sentiment de contrôle. Donc, j’encourage les gens à se concentrer sur tous les soucis qu’ils ont en ce moment, qui sont tout à fait compréhensibles, quels sont les problèmes ou les questions sur lesquels ils peuvent agir? Et souvent, il s’agit de questions très concrètes et de questions qui ont un rôle important à jouer dans le présent et dans l’immédiat. Concentrez-vous sur ce que vous pouvez contrôler. Ça peut être une stratégie très utile, parce que si nous passons du temps à réfléchir à des problèmes ou à des inquiétudes que nous avons hypothétiquement ou que nous ne contrôlons pas, nous alimentons en fait ce sentiment d’impuissance qui peut s’ajouter à notre détresse.

L’autre chose qui selon moi est aussi vraie, c’est que quand nous pensons à un sujet que nous ne maîtrisons pas, c’est qu’il y a alors des choses que nous pouvons faire pour gérer nos propres émotions. Et donc en ce moment, si les gens ont toujours eu de bonnes habitudes de sommeil, de bonnes habitudes alimentaires, qu’ils font de l’exercice, c’est le moment de mettre à profit ces bonnes pratiques et de penser peut-être à adopter d’autres pratiques comme les techniques de relaxation, la méditation, le yoga. Ce sont les principes fondamentaux auxquels je pense en ce moment. Je pense aussi que ce qui est important, c’est que nous fassions preuve d’autocompassion et de compassion avec nos collègues, avec nos supérieurs et aussi avec nos employés.

La situation à laquelle on fait face est vraiment inédite, alors c’est important d’avoir une certaine compassion et de se rappeler que même si les gens en ce moment ont beaucoup de préoccupation ou d’anxiété. Il y a beaucoup de gens qui sont prêts à collaborer et qui sont prêts à s’engager, qui veulent contribuer, et puis malgré ça, ça peut être difficile pour eux de le faire, ou elles de le faire, parce qu’ils ont leurs soucis par rapport au virus, et puis ils doivent gérer à la maison les devoirs des enfants, des activités des enfants.

Les gens ont donc actuellement de nombreuses responsabilités. Ainsi, même s’ils veulent faire leur possible pour contribuer de leur mieux, il se peut que les choses ne ressemblent pas à ce qu’elles étaient auparavant. Il est donc important d’être compatissants et patients avec nos collègues, nos employés et nos dirigeants.

John Hannaford : Oui, je suis tout à fait d’accord avec ça. Je vous remercie pour tous ces points car je pense qu’ils sont très utiles. Et je pense que le point sur la compassion est vraiment important parce que, comme vous le dites, il s’agit d’une situation unique et qui crée des tensions très précises chez les individus. Et…

Daniel Campeau : Oui.

John Hannaford : … et je pense que nous devons être conscients que nous traversons cette épreuve ensemble et nous devons être gentils les uns envers les autres. C’est une sorte de situation paradoxale et étrange que nous vivons, d’un côté, tout en étant isolés, mais d’un autre côté, c’est la même expérience pour tous. Et je pense que, exactement comme vous le dites, ce sont là des techniques très importantes

Daniel Campeau : Oui. Oui.

John Hannaford : … pour faire face à ce à quoi nous sommes confrontés.

Daniel Campeau : Oui, exactement. Et, c’est d’une certaine manière, une situation nouvelle, inédite, et on y est peut-être bien maintenant. Pas encore. Vous savez, les gens me disent, ils commencent à me parler de la « nouvelle normalité ». Et je pense que nous n’en sommes peut-être pas encore là. Je pense que nous sommes encore dans la phase de fin de quelque chose. Et nous entrons dans une phase de transition où certains d’entre nous pourraient avoir du chagrin par rapport à ce qu’était leur vie professionnelle ou personnelle. Il est donc important de se donner une chance d’expérimenter et de se pardonner si nous faisons parfois des erreurs et de nous rappeler que, oui, nous sommes tous dans le même bateau, et que c’est une situation nouvelle pour nous tous. Et c’est ce que nous devons faire en maintenant ces liens. Je pense que nous serons en mesure de nous en sortir.

John Hannaford : Daniel, quels sont les services qui sont à la disposition des gens et auxquels vous pourriez les référer, dans leur état, s’ils sont particulièrement en difficulté en ce moment?

Daniel Campeau : Eh bien, s’ils ont des difficultés, notre Ministère est un des rares ministères à disposer à l’interne d’un Programme d’aide aux employés. Et je pense qu’en ce moment, c’est une excellente occasion de profiter de ces services. Le Programme est gratuit et est accessible à tous les employés canadiens (EC), à tous les employés recrutés sur place (ERP), ainsi qu’aux membres de leur famille. Et il est relativement facile de profiter du Programme. Les gens peuvent soit m’écrire directement à Daniel.Campeau@international.gc.ca, et à mon tour je les dirigerai vers un des conseillers, ou ils peuvent même m’appeler sur mon iPhone du bureau, au 613-617-6873, et je répondrai aux appels et, encore une fois, l’écouterais et j’essaierai d’apporter un soutien ou de faire des recherches et de leur trouver un conseiller. Nous avons actuellement 5 conseillers à plein temps dans notre équipe.

John Hannaford : OK, super.

Daniel Campeau : Une…

John Hannaford : Oh désolé, Daniel, j’ai parlé en même temps que vous. Je vous écoute.

Daniel Campeau : Non, non. Une chose que je voulais ajouter, c’est que ce que j’entends. M. Hannaford, c’est que, eh bien, je penserais à vous appeler, mais je me dis que vous devez être si occupé, si débordé. Donc, vous savez, les gens pensent que je suis, ou que nous sommes, trop occupés pour répondre. Donc, s’il vous plaît, ne pensez pas ça. Nous sommes en mesure de répondre à toutes les demandes. Et n’attendez pas que la situation se dégrade, ou pire encore. Si vous pensez qu’il serait utile de parler à quelqu’un, d’avoir du soutien dès le début de votre inquiétude, de votre anxiété ou de votre détresse, n’hésitez pas à nous contacter.

Nous proposons également, bien entendu, des séances de groupe. Actuellement, nous venons de terminer des séances avec des chefs de mission et des responsables de programmes de notre réseau de missions. Et nous offrirons des séances aux personnes qui ont été rapatriées. Et aussi des séances aux employés qui sont encore dans les missions et qui incluraient, bien sûr, les employés canadiens et ceux recrutés sur place, et comment gérer au mieux et faire face aux conséquences psychologiques de la situation actuelle.

John Hannaford : Écoutez, j’apprécie vraiment le temps que vous nous avez consacré aujourd’hui, Daniel. Ce sont des commentaires très utiles. Et je vous remercie…

Daniel Campeau : Je vous en prie.

John Hannaford : aussi d’avoir identifié les services qui sont offerts. Faites attention à vous.

Daniel Campeau : Prenez soin de vous. Restez en bonne santé, s’il vous plaît.

John Hannaford : Vous aussi. Au revoir.

Daniel Campeau : Merci. Au revoir.

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