Transcription – Épisode 38 : Entretien avec Amanda Strohan
Amanda Strohan : Bonjour!
John Hannaford : Bonjour Amanda, comment allez-vous?
Amanda Strohan : Je vais bien merci. Et vous?
John Hannaford : Je vais très bien, merci beaucoup. C'est donc une occasion pour nous de parler à une collègue, Amanda Strohan, qui est sur le terrain. Elle est à Delhi, où elle travaille très fort pour nous tous, aux [services] consulaires et où elle participe aux efforts assez extraordinaires qui ont été déployés pour faciliter le retour de Canadiens au pays pendant la période actuelle. Amanda, je voulais juste commencer par vous demander, vous savez, quelle est votre situation et celle de votre famille? Vous êtes en bonne santé, et les gens de la mission, comment, à quoi les gens pensent-ils en ce moment où vous êtes?
Amanda Strohan : Bien, je – merci de me poser cette question – je m'en sors très bien. J'ai été une des personnes chanceuses. Mon mari et mon Saint-Bernard sont toujours avec moi ici, à Delhi. J'ai eu beaucoup d’appui ici à la mission. Je dirais que le moral à la mission est bon, mais les gens sont fatigués, et il y en a beaucoup ici qui sont sans leur famille. Certaines familles ne sont plus là. C'est donc un défi qui a été relevé ces derniers mois. Mais en général, le moral est bon.
John Hannaford : Bien, vous êtes assez expérimentée en ce qui concerne la gestion des crises. Cette expérience est assez unique, j'imagine. Quelles sont les choses les plus fâchantes pour vous dans les circonstances actuelles?
Amanda Strohan : Bon, ce que je peux dire par rapport aux crises, c’est qu'il n'y a jamais une crise qui ressemble à une autre. Moi, personnellement, la première crise où j'étais impliquée avec le Ministère était l'évacuation au Liban en 2006, et je peux dire que les circonstances sont très, très différentes ici en 2020 avec cette situation qui est d'abord mondiale, en nature, et donc qui crée toute une autre réalité. Le fait que c'est pas une crise géographiquement limitée, ça veut dire qu'on travaille avec ce qu'on a et donc, c'est assez intense comme expérience. Mais l'autre aspect où je pense que cette crise est différente, c'est qu'on est en train aussi de confronter la pandémie et donc les circonstances – la distanciation physique ou la distanciation sociale – qu'on est en train de devoir mettre en place, en plein milieu d'une crise, apporte toute une autre réalité et tout un autre défi pour nos équipes. Donc, c'était – l'expérience c'est qu'on utilise les outils et les atouts qu'on apprend au cours des années, mais on n'est jamais tout à fait prêt pour aucune crise qui arrive.
John Hannaford : Eh bien, c'est évidemment une situation qui comporte toutes ses contraintes et ses exigences. Que trouvez-vous utile? Vous dites que le fait d'avoir votre mari et votre chien vous procure évidemment une sorte de base, de soutien. Mais trouvez-vous d'autres choses, d'autres stratégies pour vous aider à gérer la situation d'un point de vue plus personnel?
Amanda Strohan : En ce qui me concerne, une des grandes leçons à tirer de cette situation est qu'il est très étrange de devoir fonctionner, travailler et vivre comme nous le faisons. Et donc, une des choses que j'ai vraiment appréciées dans la façon des collègues du Ministère de gérer cette crise, c'est qu'on a vraiment mis l'accent sur la santé mentale. Nous l'avons constaté, et nous avons reçu un grand soutien de la part du Programme d'aide aux employés. Et je pense que ce que nous constatons, vraiment, c'est que pour être solide, il faut penser à notre santé mentale, à notre santé physique, comprendre que pour pouvoir continuer, pour durer à long terme, nous devons considérer cela comme un effort non pas de courte durée, mais que nous devons être capables de penser à notre santé mentale et physique et de nous appuyer les uns les autres à travers cela. Nous ne sommes pas des machines, nous sommes des personnes, et nous avons besoin de ce type de soutien, en particulier quand nous essayons de pratiquer la distanciation physique ou sociale.
Alors, j'ai personnellement pris le temps de m'arrêter. Mon adorable Saint-Bernard, dont j'ai déjà parlé, est assis à mes pieds – chaque fois que je suis à mon bureau – et je prends les cinq minutes de pause dont j'ai besoin pendant la journée, ce qui me semble si important.
John Hannaford : Oui, je pense que c'est tout à fait ça. Je pense aussi que votre façon de le dire est juste. L'accent est mis sur le fait que nous allons maintenant vivre une expérience à long terme, et il y a un aspect santé mentale à cela, et c'est quelque chose dont nous devons tenir compte quand nous nous gérons nous-mêmes, mais aussi quand nous traitons avec nos familles et nos équipes et la situation qu'elles traversent elles aussi. C'est un des aspects de la question, je veux dire, nous le faisons ensemble. Nous avons donc au moins une expérience de base en commun, ce qui d'une certaine manière représente au moins une base de référence pour nous tous, alors que nous essayons de faire face à tout cela.
Amanda Strohan : Absolument. Et je pense que l'équilibre a été difficile à trouver car, si la situation est à la fois extraordinairement difficile et étrange pour les gens, nous essayons aussi de faire fonctionner les services consulaires comme jamais auparavant. Et ici en Inde, l'ampleur de la tâche est vraiment extraordinaire.
John Hannaford [perd le contact] : Ça fait donc partie de l’expérience, aussi de perdre le contact, veuillez m’excuser.
Amanda Strohan : Ne vous en faites pas.
John Hannaford : Vous étiez en train de parler de la nature extraordinaire de l'expérience, et c’est à moi qu’elle est arrivée. Mes excuses.
Amanda Strohan: Bien, en effet, c’est une expérience extraordinaire pour nous ici en Inde, mais un des défis que nous devons relever ici est certainement de trouver un équilibre entre la nécessité de fournir quelque chose d'une portée vraiment extraordinaire et celle de s'adapter à ces circonstances très inhabituelles.
John Hannaford: C'est une expérience particulière que de vivre tout cela à la mission en Inde, comme vous le dites, où la situation a été particulièrement intense. Mais comment trouvez-vous le fait d'être loin du Canada en ce moment? Et qu’est-ce que cela apporte à votre expérience?
Amanda Strohan : Je suis sur le terrain depuis un certain temps. Mais je dirais que ce que j'ai vécu personnellement, c'est tout d'abord un sentiment d'inquiétude et de préoccupation pour les amis et la famille, et le fait d'être loin de chez moi ne fait qu'amplifier ce genre de préoccupation en temps de crise, en temps de pandémie. Je pense par ailleurs que la réaction la plus marquée que j'ai eue à ce sujet est la fierté que j'ai ressentie en voyant les gens au Canada, et en constatant la façon dont les communautés se sont unies et se soutiennent mutuellement dans cette situation inhabituelle et difficile. Même si nous sommes très loin, ici en Inde, cela m'a permis de me sentir proche de chez moi, et j'ai été très fière de faire ce constat.
Et j'espère en même temps que nos amis et notre famille, que les Canadiens au pays, sont aussi fiers des efforts que font les fonctionnaires à l'étranger, que la fonction publique en poste à l'étranger a vraiment réussi à faire, et que nous avons déployé tous nos efforts pour faire tout en notre pouvoir pour aider les Canadiens. Je pense que la distance qui nous sépare du reste du monde est comblée par cette notion que nous pouvons être si fiers de notre pays en ce moment, et fiers des gens qui se rassemblent pour s’entraider.
John Hannaford : Je suis tout à fait d'accord. Et je peux vous dire qu'au moins, en ce qui me concerne, je suis profondément fier de tout le travail qui est fait sur le terrain et à l’administration centrale. Je pense que le Ministère a vraiment… il a été extraordinairement sollicité, sur l'ensemble de son réseau – et je pense que c'est un travail incroyable que les gens ont fait. Alors, écoutez, Amanda, je ne veux pas prendre plus de votre temps, mais je voulais vous remercier beaucoup pour, tout d'abord, tout ce que vous faites et pour avoir pris le temps de discuter un peu aujourd'hui. Ce fut un réel plaisir, et faites attention à vous.
Amanda Strohan : Merci, c’était un plaisir de vous parler.
John Hannaford : Tant mieux. Faites attention à vous. Au revoir!