Transcription – Épisode 54 : Employés recrutés sur place : Servir le Canada dans le monde entier
Bienvenue dans les dossiers d’AMC, un balado sur les personnes, les défis et les idées qui animent Affaires mondiales Canada.
Emmanuelle Tremblay : Les employés recrutés sur place ou ERP — vous allez nous entendre peut-être utiliser ce terme pendant l’épisode — représentent près de la moitié de l’effectif total d’Affaires mondiales Canada et les 3 quarts du personnel des missions à l’étranger. Donc, ces employés-là, on les embauche localement à travers le réseau de 178 missions dans plus de 110 pays et juridictions à travers le monde. Lorsqu’on utilise le terme « mission », on parle ici des ambassades, des hauts-commissariats et des consulats canadiens dans le monde entier.
La plupart des employés recrutés localement sont des ressortissants du pays où se trouve la mission, mais il y a aussi des personnes qui ont par exemple une double nationalité ou même des Canadiens qui travaillent à l’étranger.
La Semaine nationale de la fonction publique est une excellente occasion de mettre en lumière et de célébrer les contributions uniques des employés recrutés sur place. Même si les employés recrutés sur place sont maintenant des fonctionnaires, ces employés de l’État sont véritablement l’épine dorsale de nos missions diplomatiques et consulaires à l’étranger. Grâce aux diverses fonctions dont ils s’acquittent dans les missions, qu’ils soient jardiniers, agents consulaires principaux ou responsables d’organiser des visites ou des événements importants, ils apportent un réel soutien et contribuent à servir le Canada et les Canadiens par leur présence significative à l’étranger.
Bonjour et bienvenue à l’épisode 54, Employés recrutés sur place : Servir le Canada dans le monde entier. Mon nom est Emmanuelle Tremblay et je serai votre hôte aujourd’hui. Dans l’épisode d’aujourd’hui, nous allons entendre 3 de nos ERP [employés recrutés sur place] qui travaillent dans différentes régions du monde. Tout d’abord, Blanchine Mazanga qui vient de Kinshasa et qui y vit et qui y travaille à notre ambassade depuis 13 ans. Nous avons aussi… nous recevons aussi Bjorn Hernes qui est agent politique à notre ambassade à Oslo depuis plus de 30 ans. C’est notre vieux routier du panel. Et enfin, Caroline Urlacher qui travaille depuis quelques années à notre ambassade à Managua dans le domaine du consulaire.
D’abord et avant tout, j’inviterais Blanchine Mazanga, de Kinshasa, à se présenter.
Blanchine Mazanga : Merci beaucoup, Emmanuelle. Je suis Blanchine Mazanga. Je suis employée recrutée sur place, ERP, à l’ambassade du Canada à Kinshasa, en République démocratique du Congo. J’ai rejoint l’ambassade il y a 13 ans dans la position de Common Service Officer, gestionnaire des services communs. Je chapeaute à côté de l’AGC, l’agent gestionnaire et consulaire [agent de gestion et des affaires consulaires], toutes les équipes qui sont liées à la logistique, à l’admin [administration] et aux finances et aux ressources humaines, et au procurement [approvisionnement] à l’ambassade.
Avant d’arriver à l’ambassade, j’avais fait presque 7 ans dans ma carrière professionnelle toujours dans des positions de gestion opérationnelle vraiment liées à la logistique, à la gestion de ressources humaines et à la passation de marchés en Afrique du Sud et en RDC [République démocratique du Congo]. Et en avril 2009, j’ai rejoint l’équipe de l’ambassade pour superviser toutes les équipes. Nous sommes ce qu’on appelle une petite ambassade, mais on est à 16 employés et notre équipe, mon équipe des services communs, on est la plus grande partie des ERP, des employés recrutés sur place, parce qu’on est à peu près à 8. On soutient les programmes de l’ambassade en termes de prestation de services.
Emmanuelle Tremblay : Merci beaucoup, Blanchine. Passons maintenant à Bjorn, qui va se présenter. Alors, Bjorn, la parole est à vous.
Bjorn Hernes : Merci, Emmanuelle. Je suis content d’être ici. Eh bien, ma collaboration avec le Canada a débuté en 1986, lorsque j’étudiais à l’Université Carleton, à Ottawa. En sortant de l’université, j’ai commencé à travailler à l’ambassade. Alors, disons que je ne connais pas de meilleur ou de pire emploi. J’ai commencé à travailler dans les affaires consulaires et, au fil des ans, j’ai été chauffeur, j’ai tondu le gazon et, de là, j’ai fait de tout jusqu’à prendre part à un dîner d’État au palais de la Norvège pendant une visite officielle. Je travaille actuellement à la fois pour les services de la politique étrangère et de la diplomatie, et pour les affaires publiques et politiques. Je travaille aussi en partie à l’aspect commercial de la mission, à la commercialisation des industries créatives et de l’éducation. C’est en gros ce que j’ai fait au cours des 30 dernières années.
Emmanuelle Tremblay : Merci, Bjorn. C’est ce qu’on appelle un homme à tout faire. Vous pouvez tout faire. Maintenant, je demanderais à Caroline de se présenter. Bonjour, Caroline.
Caroline Urlacher : Bonjour. Merci beaucoup de m’avoir invitée pour ce podcast [balado]. Je suis Caroline Urlacher. Je suis employée recrutée sur place à l’ambassade du Canada au Nicaragua, précisément à Managua. Présentement, je suis adjointe des services communs, administratifs et consulaires. Avant ça, je travaillais à l’ONU, mais aussi pour le Canada au Centre de demande de visa pour le Canada. J’étais responsable du bureau de demande de visa au Nicaragua. Et j’ai aussi fait un intérim en consulaire pendant 1 an. C’était mon premier poste à l’ambassade en 2012. Donc, c’est là où j’ai commencé à travailler pour le Canada. Et c’est ce qui m’a retenue depuis ce jour jusqu’à maintenant.
Emmanuelle Tremblay : Vous entretenez tous un lien avec le Canada, maintenant. Cette relation dure depuis plus longtemps pour certains d’entre vous que pour d’autres. Mais j’aimerais savoir pourquoi vous voulez travailler pour le Canada et en faire la promotion à l’échelle mondiale dans le cadre de votre travail. Qu’est-ce que vous aimez du Canada et qui vous a réellement poussé à vouloir travailler dans une mission canadienne à l’étranger?
Blanchine Mazanga : Ce qui m’a vraiment plu de travailler pour le Canada, c’est surtout les valeurs éthiques du Canada qui sont reflétées sur le travail, sur les collègues, sur la façon de travailler au gouvernement en administration. La bureaucratie existe partout. Ça, on le sait. Mais il y a beaucoup de… on va dire dans une micro-mission comme la nôtre, on est tous collègues. Il n’y a pas ce sentiment vraiment de hiérarchie où les personnes sont inaccessibles, surtout au moment où il y a… [au moment] de crise ou de besoin. Nous sommes vraiment tous soudés et il y a beaucoup d’entraide entre nous que ce soit les employés canadiens appelés EC [Employés canadiens] et les ERP.
Ça peut sembler un peu cliché à dire parce que, quand on leur demande pourquoi ils veulent aller au Canada, c’est ce que la plupart des gens répondent. Pourquoi aimez-vous le Canada? La plupart des gens parlent toujours des valeurs humaines, des valeurs démocratiques, mais pour moi c’est vraiment quelque chose de très important. Parce que quand j’ai intégré l’ambassade, je travaillais pour Nokia International. C’était une multinationale. Et c’était très orienté aussi [sur] la culture apprenante, très orientée et dynamique, vraiment compétitive, etc.
Et quand je suis venue à l’ambassade, j’ai retrouvé ça. Et pour moi, c’était assez étonnant parce que je me disais, ambassade, ça reste quand même la fonction publique. Mais j’ai retrouvé toute cette dynamique ouverte à l’apprentissage, l’accès à l’apprentissage orienté [sur les] résultats. Et travailler à l’ambassade, pour moi, ça m’a permis de voir qu’on peut être un État. On peut être la fonction publique, mais être vraiment, vraiment fondé sur la bonne gouvernance, fondé sur la gestion efficace des ressources, sur le développement du capital humain, pour faire avancer une nation ou même une organisation. Donc, c’est ce qui m’a décidée à travailler à l’ambassade.
Bjorn Hernes : Comme je l’ai dit plus tôt, j’ai commencé au milieu des années 1980 à travailler avec le Canada et, depuis, je répète toujours que j’ai vécu dans le meilleur pays au monde ou bien que j’y travaille. C’est une situation très enviable. Je crois que, lorsque j’ai commencé à travailler pour l’ambassade, j’avais le sentiment très fort que nous avions beaucoup à apprendre les uns des autres, entre le Canada et la Norvège. Comme vous le savez, les 2 pays sont très engagés sur la scène mondiale et se situent à mi-chemin, si on peut dire, entre le rêve américain et la nonchalance européenne. En ce qui concerne le Canada, je crois qu’un de ses principaux attraits est qu’il se situe quelque part entre l’Europe et les États‑Unis.
Je crois que le fait d’amener une partie de ce libre esprit d’entreprise nord-américain et de le marier aux traditions européennes plus vieilles, et ainsi de suite, c’était en quelque sorte ce qui m’attirait et, bien sûr, je veux partager mon amour du Canada avec mes compatriotes norvégiens. Et il y a tellement de dossiers intéressants ici avec la Norvège, des enjeux de l’Arctique aux questions multilatérales, et j’en passe, travailler avec les peuples autochtones du Canada et de la Norvège. Alors c’est vraiment… vous savez, je me sens très choyé.
Emmanuelle Tremblay : Donc, il y a cette réalité double et complémentaire entre la stabilité et le changement. J’aimerais vous entendre sur ce que vous voyez comme étant des opportunités et peut-être des risques associés à cette cohabitation entre 2 parties de l’effectif d’Affaires mondiales Canada.
Blanchine Mazanga : Moi, je pense que l’élément positif que je tirais ça, et c’est là où on peut vraiment dire qu’Affaires mondiales Canada nous donne l’opportunité d’expérimenter ce qu’on appelle le multiculturisme [multiculturalisme] parce que le Canada, c’est vraiment ça. C’est la diversité culturelle et, en étant un employé recruté sur place, on est directement exposé à ça à chaque rotation. Parce que vous avez toute cette diversité culturelle d’immigration qui se retrouve dans ces positions d’employés canadiens. Et ça vous permet d’expérimenter des Canadiens d’origine africaine, des Canadiens asiatiques... Et c’est vraiment un aspect très enrichissant pour une personne de se dire que j’ai eu l’opportunité d’être exposé à autant de nationalités réunies en un seul pays. À mon sens, c’est le meilleur des aspects. Mais la force de la dynamique des employés locaux et des employés canadiens, c’est justement cette diversité qui se retrouve, ces expériences qui se retrouvent pour le bien du Canada dans chaque pays.
Caroline Urlacher : Nous savons très bien qu’en général, tout est très encadré. Tout fonctionne, on va dire assez rapidement, assez bien en général. C’est… mais en mission, surtout dans les missions compliquées, ils ont besoin d’un moment, de quelques mois d’adaptation et de voir que les choses doivent se faire des fois différemment. Donc, nous, au lieu d’essayer de suivre un protocole qui est déjà établi, ou défini, nous, on doit chercher les façons d’arriver à un résultat. Enfin, le résultat du travail que nous devons faire, mais en s’adaptant.
Donc, ça, des fois, c’est un défi pour eux, mais à la fin, nous, on est là pour leur expliquer, pour leur dire et surtout pour les aider dans ce processus d’adaptation et aussi d’apprentissage surtout de ce qui est la réalité du pays, en fait, là où ils sont, où ils arrivent.
Emmanuelle Tremblay : Alors, si je vous comprends bien, les employés recrutés sur place font souvent office d’interprètes, non seulement d’un point de vue linguistique, mais aussi social, politique et ethnographique. Alors, Bjorn, aimeriez-vous dire quelques mots au sujet de ce lien entre les employés canadiens, les diplomates et les employés recrutés sur place?
Bjorn Hernes : Je crois que les employés recrutés sur place doivent aussi admettre qu’il n’est pas toujours facile pour les employés canadiens de venir à une mission, dans un nouveau pays, d’y emmener une famille et j’en passe, en quelque sorte n’avoir peut-être pas les bonnes conditions ou la formation les préparant avant leur arrivée et tout ce que ça implique. Alors c’est très facile de tomber dans le piège et de critiquer. Je m’assure toujours, ou j’essaie au mieux, de donner du temps, autant pour mes propres réactions aux gens nouveaux que pour qu’ils apprennent à me connaître. C’est un peu un exercice de communication à divers niveaux également, de part et d’autre.
Je crois — et vous savez, on dit souvent que les ERP sont en quelque sorte la mémoire la plus dure et, bien sûr, la mémoire organisationnelle ou autre, mais je dis toujours que je ne me sens pas comme — je ne veux pas être perçu comme un disque dur. Désolé, je me suis mal exprimé. Quoi qu’il en soit, je crois que… en partie, je crois qu’il faut aussi reconnaître le rôle actif des ERP dans les missions. Et je crois qu’un des autres points assez importants, c’est que l’administration centrale voit les choses du même œil.
Emmanuelle Tremblay : Comment le travail des ERP a-t-il évolué avec le temps? Et comment la technologie, par exemple, a-t-elle changé, ou encore le travail des employés recrutés sur place ou la façon dont ils s’en acquittent? Vous avez peut-être quelques anecdotes à nous raconter.
Bjorn Hernes : Eh bien, je crois avoir déjà mentionné que, au début, quand j’ai commencé à travailler ici, j’avais une machine à écrire électrique. Nous utilisons aujourd’hui Office 365. Alors, de toute évidence, il y a eu un gros virage technologique. Et j’y pensais un peu parce qu’hier, c’est également une nouvelle annonce de transformation pour Affaires mondiales Canada. Je me disais qu’au fil des ans, si je fouille, je vais trouver des dossiers provenant de mon prédécesseur qui avait commencé à travailler ici vers 1950. Si je consulte ces dossiers, ce que nous faisons aujourd’hui, comparativement aux années 1950 et 1960, n’est pas si différent.
Ce n’est pas tant ce que nous faisons, que notre manière de le faire. C’est davantage une façon différente de recueillir l’information au sujet, vous savez, des politiques locales de la Norvège ou de n’importe quoi d’autre. Autrefois, on participait à des réunions avec les partis politiques et, avant une élection, on essayait de produire des rapports. De nos jours, vous savez, on lit des blogues et on participe à des séminaires et à ce genre d’activités. Alors, l’essentiel de notre travail de prestation de services — j’aime être utile au Canada, ici en Norvège — n’a pas changé tant que ça.
Nous organisons des événements culturels. Nous faisons de la sensibilisation. Je veux dire, vous savez, nous délivrons des passeports. Nous faisons ce genre de choses qui aident les Canadiens qui vivent ici, et ainsi de suite. Mais c’est davantage notre façon de le faire. Les méthodes et les outils que nous utilisons ont changé. Le Canada avait tôt fait d’adopter la messagerie électronique d’Affaires étrangères. Je me souviens que mon ambassadeur de l’époque était réellement effrayé, vous savez. Qu’est-ce qui va arriver? Je n’en ai pas le contrôle. Mais il n’avait pas réalisé que nous pouvions également utiliser nos téléphones.
Ce n’était pas si grave, mais à un certain moment, je lui ai également parlé à l’ambassade de la Norvège. Il y avait un appareil doté de la messagerie électronique et c’était plusieurs années après que nous ayons eu accès au courriel. Ils devaient en quelque sorte courir à cet appareil et envoyer des courriels. Alors, oui, c’est tout un changement en ce sens-là, mais comme je l’ai dit, notre raison d’être ici et ce que nous y faisons n’ont pas beaucoup changé avec les années. Je crois donc que ça résume le tout, d’une certaine façon. Oui.
Caroline Urlacher : J’ai juste une petite chose à ajouter. Pour moi, c’est moi qui suis une personne, j’essaie de suivre aussi. Je sais que le Canada est très accentué sur ça, sur l’écologie. Donc, pour moi, c’est vraiment quand je vois toutes les archives en administration que nous gérons. Tous les paiements qui sont en papier. Donc, tous les ans, on doit brûler des centaines de boîtes d’archives. Donc, maintenant avec la digitalisation [numérisation], j’essaie d’utiliser le moins de papier possible. Et aussi, pour le travail consulaire, ça nous a tellement facilité la tâche de pouvoir contacter les personnes, les personnes qui sont enregistrées dans le système consulaire, nous savons qu’ils sont dans le pays. C’est un système qui vraiment nous a facilité la tâche au niveau consulaire pour pouvoir avoir un contact avec les Canadiens, et la communication est vraiment plus facile pour nous. Je pense que ça, c’est 2 choses qui ont beaucoup changé dans le positif.
Emmanuelle Tremblay : Alors, la dépendance à la technologie a apporté une certaine fluidité qui n’existait pas avant et qui ne sert pas uniquement à votre travail d’employé recruté sur place, mais qui permet également de servir les Canadiens. Et Blanchine, vous aviez aussi quelque chose à dire là-dessus.
Blanchine Mazanga : Donc, ce que moi j’aimerais souligner, c’est que le cadre du travail d’ERP [employés recrutés sur place] n’a pas vraiment évolué au fil des ans. Les aspects technologiques, comme Bjorn l’a dit, ont évolué parce que c’est la dynamique même en société. Mais ce que moi j’ai remarqué qui a quand même évolué au niveau global d’Affaires mondiales Canada, c’est que nous pouvons constater qu’AMC est à l’écoule des ERP, ce qui est vraiment bien. Parce que, depuis 2019, je crois que c’était notre premier symposium des ERP, un symposium des ERP du monde entier. Nous savions que nous sommes la main-d’œuvre.
Lorsque vous dites que vous nous utilisez, faites simplement le travail et c’est ce que nous attendons de vous. Mais depuis 2019, on a vu quand même une dynamique de « OK, vous êtes là et on veut vous écouter ». On veut voir comment on peut améliorer votre cadre de travail, améliorer votre sentiment d’appartenance à Affaires mondiales Canada pour que vous soyez plus que juste des employés, mais que vous fassiez partie de la famille réellement.
Bjorn Hernes : Blanchine a mentionné le symposium de 2019 et, vraiment, c’est le groupe — de plus ou moins 50 employés recrutés sur place provenant du monde entier — qui travaille uniquement pour le Canada. Il se dégageait toute une énergie et, à mon sens, c’est très important qu’il y ait cette chaîne de communication et un lien direct entre les ERP des missions et les principales divisions ou autres unités de l’administration centrale d’Affaires mondiales Canada. Être en mesure, si on veut, de mettre en lumière les contributions des ERP et, aussi, de faire participer les employés recrutés sur place à certains des travaux réalisés à l’administration centrale, je crois que c’est réellement important.
Nous avons travaillé, vous savez, à l’aspect commercial. Les ERP ont également participé et, de plus, j’ai moi-même fait partie d’un bureau de projet relevant des sous-ministres — j’y ai travaillé au harcèlement et à sa prévention. Mais vous savez, travailler aussi avec les ERP, je crois que c’est tellement… c’est en fait, je crois, un très grand pas vers l’avant pour les relations entre les ERP, les employés recrutés sur place et l’administration centrale. C’est très loin, et la plupart n’y ont jamais eu accès. Je crois aussi que pour le personnel de l’administration centrale, les employés recrutés sur place sont parfois assez isolés d’eux. Je crois donc super important de pratiquer un rapprochement et d’entretenir des contacts directs.
Emmanuelle Tremblay : Est-ce que vous pourriez partager avec nous un moment qui est vraiment très mémorable pour vous? Vous pourriez peut-être nous raconter un moment important pour vous, et ce pourrait être une occasion de présenter la diversité de vos expériences, selon ce que vous faites à la mission.
Bjorn Hernes : Eh bien, disons qu’il y en a tant eu au cours des années, mais une qui me vient toujours à l’esprit remonte à 2004, ou à peu près. C’était au cours d’un festival qui se déroulait dans le nord de la Norvège, soit le festival de Reykjavík dont la programmation artistique est autochtone. Cette année-là, les Inuits du Nunavik étaient à l’honneur. C’est un petit endroit isolé sans hôtel. Alors, j’étais avec mon collègue de la Maison du Québec à Londres. Nous étions là pour représenter le Canada et le Québec. Nous avons été hébergés chez des gens, où nous avons dû, en fait, partager une chambre.
C’était une des chambres des enfants. Étant un bon fédéraliste, je lui ai laissé le lit et j’ai dormi sur le sol. Ce festival met fortement l’accent sur… vous savez, les gens sont à l’honneur. Une journée était consacrée à la cuisine. Mais ils avaient apporté, ils apportent habituellement du caribou, mais, dans le nord de la Norvège, on trouve le renne, un cousin du caribou. Ils devaient donc… la délégation du Nunavik était censée, vous savez, préparer des mets, et nous nous sommes donc rendus à l’école pour aider. À notre arrivée, ils m’ont vu, un Autochtone de cette région du monde de la Norvège, sont entrés avec le renne, et l’ont tout simplement jeté sur la table.
Ce gars qui vivait à Oslo et l’autre qui habitait à Londres, vous savez, regardaient la chose. Qu’est-ce qu’on en fait? Parce qu’il n’y avait personne à ce moment-là pour nous aider. Alors c’était assez… disons — vous savez, quelqu’un est enfin arrivé — les femmes du Nunavik sont arrivées et nous ont en quelque sorte appris à débiter l’animal et à retirer la moelle et tout le reste. L’expérience a été bonne en fin de compte. C’était comme… la vision qu’ils ont dû avoir de ces deux gars qui regardaient sans savoir quoi faire. Du moins, de mon point de vue, c’était un moment mémorable.
Blanchine Mazanga : Le souvenir qui m’a le plus marquée parce que souvent on est « publicité » pour le travail. On fait bien le travail. On livre la marchandise. Mais ce qui m’a vraiment touchée, c’est quand j’ai repris les études en 2015 pour faire un master [une maîtrise] et j’en ai parlé à ma supérieure de l’époque, une dame merveilleuse, Marie-Claude Fouché. Elle m’a dit, oui, je t’encourage. Vas-y. C’était difficile pour moi parce que je finis à 16 h. Je reprenais le cours à l’extrême de la ville à 17 h, finir à 21 h. J’arrive chez moi à 22 h. Le lendemain, je dois être au bureau à 7 h 30.
Et j’ai été dans ce rythme-là pendant 2 ans. Et à la fin, je devais faire la présentation de ma thèse. Le jour « J » j’ai signalé à ma superviseure que je devais aller. Elle m’a encouragée. Je suis partie. Mais ce qui m’a vraiment touchée, c’est cette partie humaine qui parfois manque entre employés canadiens et ERP, et le fait que les gens le manifestent. Ça reste des moments mémorables. Je pense que mes collègues seraient d’accord avec moi.
Donc, je rentre au bureau et je trouve sur ma table un bouquet de fleurs avec une petite note et c’était elle, ma superviseure, qui me l’avait acheté et qui m’avait dit, on est très, très fiers de toi. Et je me suis dit, ça, c’est merveilleux parce qu’au-delà de ce qui est attendu de nous en tant qu’employés et collaborateurs, nous pouvons dire que, quelque part, ils valorisent aussi les personnes que nous sommes. Et ils sont également là pour nous lorsque nous en avons besoin, quand ça ne concerne pas le travail. C’est ça vraiment mon expérience la plus mémorable.
Caroline Urlacher : Et puis alors, pour moi, l’expérience la plus mémorable dans tous les sens, c’était, ben justement il y a 2 ans, les vols d’évacuation que nous avons dû organiser. Enfin, le Canada les a organisés et, nous, nous devons évacuer les Canadiens qui étaient en tant que… nous sommes que 3 personnes en administration et consulaire dans la mission. Donc, pour 3 000 Canadiens, on va dire que c’est quand même beaucoup. Donc, entre nous, ben, nous avons pu faire les listes, gérer les vols, gérer les… c’était vraiment un travail très, très, très compliqué.
Tout le monde avait plusieurs fonctions dans plusieurs domaines. Ça, ça nous a vraiment permis de nous surpasser et de surpasser notre propre stress, parce que c’est vrai qu’en temps de pandémie en plus de crise sociopolitique, il y a tout en même temps. Nous sommes vraiment très stressés dans notre vie personnelle et c’est comme si on laissait ça de côté pour aider, faire notre travail. Un mois après, bien sûr, nous avons reçu les félicitations de HQ [administration centrale], de la centrale, en disant que s’ils savaient qu’une micro-mission qui a pu gérer une situation aussi compliquée, c’était quand même… cette reconnaissance pour nous.
Emmanuelle Tremblay : C’était apprécié, on va dire.
Caroline Urlacher : Voilà, c’était très apprécié, voilà.
Emmanuelle Tremblay : Je vous remercie tous beaucoup. C’était vraiment bien de vous avoir tous aujourd’hui pour raconter vos histoires. Ça a été un plaisir, Blanchine, Bjorn et Caroline. Merci beaucoup de votre temps. Je tiens aussi à souligner que non seulement les employés recrutés sur place servent aux missions d’AMC, mais qu’il s’agit d’une réelle main-d’œuvre gouvernementale. Merci énormément de nous avoir écoutés, et au plaisir de vous retrouver sous peu. À bientôt.
Les dossiers d’AMC sont une production d’Affaires mondiales Canada. Toutes les opinions exprimées dans ce balado sont celles des personnes concernées et pas nécessairement celles de leurs employeurs ou d’Affaires mondiales Canada. Pour plus d’information sur les employés recrutés sur place, visitez le www.international.gc.ca. N’oubliez pas de vous abonner à notre balado et merci d’avoir écouté les dossiers d’AMC.