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Rapport annuel 2022 – Application des Instructions visant à éviter la complicité dans les cas de mauvais traitements infligés par des entités étrangères

Introduction

Le présent rapport décrit les activités entreprises par Affaires mondiales Canada (AMC) du 1er janvier au 31 décembre 2022 concernant la mise en œuvre de la Loi visant à éviter la complicité dans les cas de mauvais traitements infligés par des entités étrangères (LECCMTIEE ou la Loi) et du décret sur les Instructions visant à éviter la complicité dans les cas de mauvais traitements infligés par des entités étrangères (les instructions).

Durant la période visée par le rapport, AMC a élaboré des ressources pour favoriser la mise en œuvre de la Loi dans l’ensemble de ses secteurs d’activité et a travaillé avec d’autres ministères et organismes fédéraux afin d’échanger des pratiques exemplaires. Mentionnons notamment que les activités de formation en personne au sujet de la Loi ont repris pour la première fois depuis le début de la pandémie de COVID-19, alors que les fonctionnaires ont recommencé à se rendre au bureau plus régulièrement. Le Ministère a également participé à une nouvelle initiative visant à mieux coordonner les activités d’établissement de rapports sur les droits de la personne et d’évaluations des risques connexes entre les ministères, en tenant compte des recommandations formulées antérieurement par l’Office de surveillance des activités en matière de sécurité nationale et de renseignement (OSSNR). En 2022, AMC n’a pas mis en œuvre une activité d’échange de renseignements lors de laquelle les restrictions en vigueur au titre du décret sur les instructions auraient pu s’appliquer et aucune limite sur les ententes en matière d’échange de renseignements n’a été imposée par le Ministère ou l’administrateur général.

Le rapport suivant donne un compte rendu des obligations d’AMC au titre de la Loi et du décret sur les instructions, résume les activités internes menées par le Ministère en 2022 et souligne les efforts collaboratifs entrepris par les représentants d’AMC avec leurs homologues d’autres ministères durant la période visée par le rapport.

Contexte

En vertu du paragraphe 7(1) de la Loi, le sous-ministre des Affaires étrangères est tenue de soumettre à la ministre des Affaires étrangères, avant le 1er mars de chaque année, un rapport sur la mise en œuvre du décret sur les instructions réalisées par le Ministère au cours de l’année civile précédente.

La Loi et le décret connexe sur les instructions, qui ont été publiées en septembre 2019, restreignent l’échange de renseignements avec des entités étrangères lorsqu’il existe un risque important de mauvais traitements et établissent des limites concernant certaines utilisations de renseignements susceptibles d’avoir été obtenus à la suite de mauvais traitements. Plus particulièrement, le décret sur les instructions interdit :

 

Avant la publication du décret, AMC était assujetti à l’Instruction du ministre à l’intention d’Affaires mondiales Canada : éviter la complicité dans les cas de mauvais traitements par des entités étrangères de 2017.Les exigences contenues dans l’Instruction de 2017 et le décret de 2019 sont essentiellement les mêmes. Depuis l’adoption de la Loi, le Ministère a actualisé les politiques et les processus élaborés en 2017 afin d’améliorer constamment la mise en œuvre de la Loi et du décret sur les instructions. L’élaboration de la politique d’AMC sur l’échange de renseignements est menée en fonction des obligations réglementaires du Ministère, de certaines définitions contenues dans l’Instruction de 2017 qui sont absentes du décret sur les instructions, ainsi que des recommandations découlant des récents examens menés par l’Office de surveillance des activités en matière de sécurité nationale et de renseignement (OSSNR) au sujet de la mise en œuvre de la Loi par le gouvernement.

Dans le cadre de son mandat, AMC recueille et utilise des renseignements obtenus d’autres ministères fédéraux et d’entités étrangères, notamment au moyen de rapports diplomatiques. En effet, la nature même de la diplomatie implique des échanges fréquents de renseignements. De plus, la promotion et la défense des droits de la personne sont une priorité clé d’AMC et le Ministère lutte activement sur le plan de ses relations bilatérales et au sein d’organisations multilatérales contre la torture et les traitements inhumains.

La grande majorité des renseignements échangés par AMC ne concernent pas des personnes. Lorsque l’échange de renseignements pouvant mettre une personne à risque de subir de la torture ou des mauvais traitements peut être considéré comme nécessaire, le décret sur les instructions offre des conseils clairs aux agents au sujet des considérations pertinentes pour leurs prises de décisions.

Gouvernance et ressources du ministère

Comité de conformité pour éviter les mauvais traitements

Le Comité de conformité pour éviter les mauvais traitements (le Comité; CCEMT) est le mécanisme de gouvernance officiel qui aide le Ministère à se conformer à ses obligations telles qu’elles sont décrites dans le décret sur les instructions. Le rôle principal du comité est de prendre des décisions concernant le risque posé par les activités de partage de renseignements avec une entité étrangère, de recommander des mesures d’atténuation des risques, le cas échéant, et de renvoyer les décisions au sous-ministre des Affaires étrangères, si nécessaire. Le Comité est soutenu par un secrétariat qui aide à communiquer les décisions au sein du Ministère, ainsi qu’à documenter la façon dont les cas sont gérés. Le comité est similaire aux mécanismes qui existent dans d’autres ministères et organismes assujettis à LECCMTIEE.

Le Comité est convoqué sur une base ponctuelle pour examiner la proposition de divulgation, de demande ou d’utilisation de renseignements par une direction ou une mission d’AMC dans les cas où les interdictions prévues par le décret sur les instructions peuvent s’appliquer. Comme aucun cas n’a été soumis au comité en 2022, le comité ne s’est pas réuni pendant la période de référence.

Le secrétariat du comité a réalisé une évaluation interne complète du mécanisme et du mandat du Comité en 2022. L’évaluation comprenait 14 recommandations au président du comité visant à clarifier l’objectif du comité et les rôles et responsabilités de chaque membre. L’évaluation a également recommandé que le président soit autorisé à convoquer le comité en l’absence d’un cas nécessitant une décision, afin de permettre aux membres de rester au courant du dossier et de mieux faire connaître les obligations du Ministère en vertu du décret sur les instructions.

À la suite de l’évaluation, le secrétariat a commencé à préparer un mandat actualisé qui sera examiné par les membres du Comité au début de 2023.

Politiques et procédures internes

AMC a continué à élaborer ses orientations politiques afin de soutenir la mise en œuvre du décret sur les instructions dans tous les secteurs d’activité en 2022. Le Ministère a élaboré des orientations politiques prêtes à l’emploi pour les directions qui s’engagent dans des activités de partage de renseignements et qui utilisent des formulaires pour documenter la prise de décision dans les cas où les interdictions prévues par le décret sur les instructions peuvent s’appliquer. AMC publiera ces documents par le biais de divers canaux internes afin de mieux faire connaître les obligations du Ministère en vertu de la LECCMTIEE et du décret sur les instructions, et d’assurer le respect de la loi. Le Ministère prévoit également d’élaborer de nouveaux outils de formation concernant ses obligations en matière de partage de renseignements avec des entités étrangères afin d’aider les fonctionnaires de tous les secteurs, en particulier le personnel en poste dans les missions à l’étranger.

Formation et sensibilisation

Après plusieurs années où les possibilités de formation en personne étaient limitées en raison de la pandémie de COVID-19, le Ministère a pu reprendre les activités de formation liées à LECCMTIEE en 2022. Les obligations du Ministère en vertu de la loi et du décret sur les instructions sont intégrées dans un cours de formation plus large sur le renseignement intitulé « Gouvernance, accès, sécurité technique et espionnage » (GATE), qui a été dispensé à un total de 326 employés lors de 30 séances de formation au cours de la période visée. Une séance approfondie sur les pratiques de partage de renseignements du Ministère, y compris ses obligations en vertu du décret, a également été offerte aux agents du Programme de rapports sur la sécurité mondiale (PRSM) le 8 juillet 2022. Enfin, le Guide du chef de mission (CDM) du Ministère fourni à tous les nouveaux CDM comprend une section complète sur les obligations d’AMC en vertu du décret sur les instructions, y compris les procédures sur la façon de transmettre les cas au CCEMT. 

La Direction générale des politiques consulaires a offert une formation sur le sujet sous diverses formes, notamment l’enregistrement vidéo en ligne de l’atelier « Allégations de torture et de mauvais traitements », des séances pendant la semaine de préparation à l’affectation consulaire ainsi que dans le cours en ligne « Protection des renseignements personnels : le rôle de l’agent consulaire ». Ces différents cours, qui ont permis aux employés de découvrir la LECCMTIEE et le décret sur les instructions, ont été livrés à 82 employés en 2022.

Rapports sur les droits de la personne

Les rapports sur les droits de la personne d’AMC fournissent un aperçu fondé sur des données probantes de la situation des droits de la personne dans un pays donné, y compris les événements, les tendances et les faits nouveaux importants. Les rapports orientent l’engagement international du Canada, notamment en matière de politique étrangère, de développement, de commerce et d’activités consulaires. Ils sont préparés par les missions diplomatiques du Canada à l’étranger et peuvent constituer des documents classifiés. Ces rapports sont produits à l’intention d’un public interne au gouvernement du Canada et sont mis à la disposition d’un grand éventail de ministères et d’organismes, dont la Gendarmerie royale du Canada (GRC), le Service canadien du renseignement de sécurité (SCRS), l’Agence des services frontaliers du Canada (ASFC), Immigration, Réfugiés et Citoyenneté Canada (IRCC), le ministère de la Défense nationale (MDN), Sécurité publique Canada (SP) et le Centre de la sécurité des télécommunications (CST). Ils étayent les évaluations des risques fondées sur des données probantes qui sont effectuées par plusieurs ministères et organismes dans les situations où les obligations générées par le décret sur les instructions peuvent entrer en jeu.

Le modèle de rapport sur les droits de la personne d’AMC et les consignes qui l’accompagnent comprennent désormais une section obligatoire sur les risques de torture et de mauvais traitements. Les rapports sont une source d’information importante pour guider la prise de décisions dans les situations où le décret sur les instructions peut s’appliquer. En réaction à la hausse de la demande en données fiables sur les mauvais traitements depuis l’adoption du décret sur les instructions, en 2022, AMC a revu ses modèles de rapports et les consignes connexes afin de colliger, auprès des missions, des renseignements plus détaillés et pertinents sur la torture et les mauvais traitements.

Pour la période allant de janvier à décembre 2021, le personnel des missions du Canada à l’étranger a produit 33 rapports sur les droits de la personne portant sur des pays ciblés. Chaque année, après consultation avec les directions géographiques d’AMC ainsi que d’autres ministères et organismes fédéraux et en collaboration avec les missions diplomatiques du Canada à l’étranger, une liste de pays est dressée pour orienter les efforts du Ministère en matière de rapports sur les droits de la personne. Le processus de sélection des pays s’appuie sur le rapport sur les plans et les priorités d’AMC, l’Examen périodique universel des Nations Unies et les rapports émanant d’organisations réputées en matière de défense des droits de la personne. Il est nécessaire de produire un rapport annuel sur un pays particulier lorsque des renseignements sur la situation des droits de la personne dans ce pays s’avèrent essentiels au travail des partenaires de la sécurité et des divisions clientes d’AMC. Le Ministère met ces rapports à la disposition de tous les autres ministères et organismes qui ont reçu des instructions découlant de la Loi afin d’appuyer leurs évaluations dans les situations où les obligations en vertu du décret sur les instructions peuvent entrer en jeu. AMC continuera de collaborer avec les autres ministères et organismes gouvernementaux au sujet de la production de rapports sur les droits de la personne afin de fournir des renseignements pertinents fondés sur des données probantes et de guider la prise de décisions concernant les instructions.

À l’automne 2022, la direction générale du Bureau des droits de la personne, des libertés et de l’inclusion d’AMC a envoyé un message à tous les chefs de mission à l’étranger pour lancer le cycle annuel de production des rapports sur les droits de la personne et leur rappeler le rôle important de ces rapports pour veiller au respect des instructions de la Loi, non seulement par AMC, mais par tous les ministères et organismes partenaires assujettis aux mêmes obligations.

Collaboration avec d’autres ministères et organismes gouvernementaux

Consultation interministérielle sur les droits de la personne

En novembre et décembre 2022, les représentants d’AMC ont participé à une consultation interministérielle sur les droits de la personne de niveau opérationnel avec leurs homologues du CST, du SCRS et du MDN. Il convient de noter que la représentation d’AMC comptait 28 membres. Au cours de cette réunion de trois jours, les participants ont examiné l’évaluation respective des risques pour les droits de la personne de chaque ministère dans plusieurs pays ainsi que la méthode qu’utilise chaque ministère pour traiter les cas visés par les interdictions prévues par le décret sur les instructions. Afin d’assurer une plus grande uniformité des échanges de renseignements avec des entités étrangères, l’ordre du jour portait sur des pays précis où il existe des écarts entre les évaluations des risques effectuées par les ministères.

Bien qu’AMC ne produise pas d’évaluation des risques à cet égard, les interventions du Ministère ont été guidées par ses rapports annuels sur les droits de la personne ainsi que la contribution des missions et des Directions géographiques. D’autres ministères et organismes gouvernementaux ont indiqué que la perspective d’AMC sur le terrain est particulièrement utile pour élaborer les évaluations des risques pour les droits de la personne.

La réunion a été proposée par le MDN à la suite de la recommandation de l’OSSNR demandant « aux ministères de trouver un moyen d’établir des outils harmonisés et normalisés d’évaluation des risques que présentent les pays et les entités afin de soutenir l’adoption d’une approche uniforme par les ministères lorsqu’ils interagissent avec des entités étrangères qui suscitent des préoccupations au regard de la Loi ». Bien que tous les ministères et organismes présents à la réunion aient l’intention de continuer à élaborer leurs profils de pays respectifs, ils ont convenu d’échanger les résultats des évaluations des risques sur demande à l’avenir. AMC s’est engagé à poursuivre la mise en commun de ses rapports sur les droits de la personne de manière proactive avec la communauté interministérielle. Plusieurs participants ont également exprimé leur intérêt pour le développement d'un moyen de partager les profils de leurs départements d'une manière similaire à celle d’AMC. Étant donné que la situation des droits de la personne dans le monde est en constante évolution, le MDN prévoit refaire cet exercice périodiquement.

Groupe de coordination d’échange de renseignements

AMC participe au Groupe de coordination d’échange de renseignements (GCER), un groupe de travail interministériel dirigé par Sécurité publique Canada pour appuyer une approche coordonnée de la mise en œuvre du décret sur les instructions dans tous les ministères et organismes concernés. En 2022, le GCER s’est réuni à quatre reprises. Les représentants d’AMC ont contribué aux discussions sur les politiques et les procédures ministérielles relatives à la mise en œuvre du décret sur les instructions, aux leçons tirées afin d’établir une approche cohérente des évaluations des risques à l’échelle du pays, ainsi qu’à la méthodologie et aux meilleures pratiques employées pour produire des rapports sur les droits de la personne.

Comité d’évaluation des échanges d’informations (scrs)

AMC siège à titre consultatif au Comité d’évaluation des échanges d’informations (CEEI) du SCRS, qui est à la disposition des gestionnaires de cet organisme pour formuler des avis en matière de droits de la personne et de considérations liées à la politique étrangère. Le CEEI est un comité composé de directeurs généraux du SCRS qui se réunit de façon ponctuelle pour délibérer sur des cas susceptibles de présenter un risque accru de mauvais traitements. Il évalue des cas où la divulgation ou la demande de renseignements à des entités étrangères, ou l’utilisation de renseignements provenant d’entités étrangères sont envisagées, et qu’il faut décider si une mesure proposée peut ou non aller de l’avant conformément à la politique du SCRS, à la LECCMTIEE et au décret sur les instructions.

Avant de participer à ces réunions, les fonctionnaires d’AMC se réunissent pour déterminer les considérations du point de vue du Ministère, y compris les considérations juridiques liées au régime de sanctions économiques d’AMC, les évaluations des antécédents en matière de droits de la personne des entités faisant l’objet de la discussion et toute considération de politique consulaire ou étrangère. Le représentant d’AMC fournit ensuite des commentaires au CEEI à l’appui d’une décision des représentants du SCRS sur un plan d’action, y compris toute mesure d’atténuation éventuelle pour garantir la conformité au décret sur les instructions.

Conclusion

Au cours de la période visée par le rapport, aucun cas d’échange de renseignements présenté à AMC ne comportait de risque important de mauvais traitements. Par conséquent, le décret sur les instructions n’a pas été appliqué. De même, aucune restriction n’a été mise en œuvre par AMC concernant les ententes ou les arrangements d’échange de renseignements en raison de préoccupations liées à la torture ou aux mauvais traitements.

AMC a continué de promouvoir la mise en œuvre complète de la LECCMTIEE et du décret sur les instructions dans toutes les filières et a collaboré avec ses homologues d’autres ministères pour élaborer une approche coordonnée visant à réduire les risques liés à la maltraitance. Au cours de l’année à venir, AMC améliorera l’accessibilité des ressources sur les obligations du Ministère pour les Secteurs à l’administration centrale et dans les missions à l’étranger et augmentera les possibilités de formation liées à la LECCMTIEE et au décret sur les instructions. En outre, le Ministère continuera de collaborer activement avec d’autres ministères et organismes pour appliquer la Loi en fournissant ses rapports sur les droits de la personne à la collectivité pangouvernementale et en participant à des initiatives interministérielles.

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