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Évaluation formative de la réponse du Canada à la crise des réfugiés et des migrants vénézuéliens en Amérique latine et dans les Caraïbes

Le 23 décembre, 2023

*Les constatations, conclusions, recommandations et leçons présentées ci-dessous sont celles de l’entrepreneur et ne reflètent pas nécessairement les points de vue du Ministère ou du gouvernement du Canada. Le Ministère ne garantit pas l’exactitude des renseignements contenus dans ce rapport.

Table des matières

Acronymes et abréviations

ACCBP
DFATD Programme de renforcement des capacités de lutte contre la criminalité
ACS+
Analyse comparative entre les sexes +
ALC
Amérique latine et Caraïbes
AQ
Assurance qualité
BID
Banque interaméricaine de développement
BM
Banque mondiale
CFLI
Fonds canadien pour les initiatives locales
DFAT
Département des affaires étrangères, du commerce et du développement
DTM
Matrice de suivi des déplacements
ECHO
Office d'aide humanitaire de la Communauté européenne
ECW
L'éducation ne peut pas attendre
EDME
Matrice de conception de l'évaluation
EG
Égalité de genre
EIC
Entretien avec un Informateur Clé
ET
Équipe d'évaluation
GDD
Groupe de discussion
GDC
Gouvernement du Canada
ILO
Organisation internationale du travail
ICP
Indicateurs clés de performance
IOM
Organisation internationale pour les migrations
IRCC
Immigration, réfugiés et citoyenneté Canada
ML
Modèle Logique
NLX
Groupe de travail du DFATD sur le Venezuela
OAS
Organisation des États américains
OECD
Organisation de coopération et de développement économiques
ONG
Organisation non gouvernementale
OSC
Organisations de la société civile
PAIF
Politique d’aide internationale féministe du Canada
PMFP
Cadre de mesure de la performance
PRM
Population, réfugiés et migrations
PTL
Chef de projet du DFATD pour l'évaluation
QE
Question d'évaluation
R4V
Plateforme régionale de coordination interagences pour les réfugiés et les migrants du Venezuela
RMRP
Plan d'intervention pour les réfugiés et les migrants
SAR
Suivi axé sur les résultats
SSDR
Santé sexuelle et reproductive
SOW
Déclaration de travail
TA
Activité technique
TB
Conseil du Trésor
TIP
Trafic des personnes
ToC
Théorie du changement
TVET
Enseignement technique et professionnel Formation
UNEG
Groupe d'évaluation des Nations unies
UNFPA
Fonds des Nations Unies pour la population
UNHCR
L’agence des Nations Unies pour les réfugiés
UNICEF
Fonds des Nations unies pour l'enfance
UNODC
Office des Nations unies contre la drogue et le crime
VFG
Violence fondée sur le sexe
VRM
Réfugiés et migrants vénézuéliens
WASH
Eau, Assainissement et Hygiène

Résumé

Vue d'ensemble, justification, but et objectifs

Il s'agit du rapport final de l'évaluation de la réponse du Canada à la crise des réfugiés et des migrants vénézuéliens en Amérique latine et dans la région des Caraïbes, un programme de 59,9 millions de dollars géré par le DFATD et l'IRCC. L'agent commanditaire de l'évaluation était la Direction générale des Amériques du DFATD. Salasan Consulting Inc. a été le cabinet de conseil canadien chargé de concevoir et de mettre en œuvre l'évaluation et de préparer le présent rapport.

La mise en œuvre des projets dans le cadre de ce programme de deux ans a débuté en mars 2022. L'évaluation a donc eu lieu à peu près à mi-parcours du cycle de vie du programme. Alors que la crise se poursuit, le Canada réfléchit à l'impact de ce programme à ce jour, d'où cette évaluation. L'objectif de l'évaluation est de fournir une appréciation indépendante des progrès réalisés et des résultats obtenus. Plus précisément, les objectifs de l'évaluation sont les suivants

Résumé de l'intervention

Le programme comprend un portefeuille de 18 projets approuvés couvrant neuf pays (Argentine, Brésil, Chili, Colombie, Équateur, Guyana, Panama, Pérou et Trinité-et-Tobago), la majorité des activités et des bénéficiaires ciblés se trouvant en Colombie, en Équateur et au Pérou. Tous les projets, sauf cinq, sont mis en œuvre dans plus d'un pays - généralement deux ou trois - et un tiers des projets ont une portée régionale. Les bénéficiaires directs sont les réfugiés et les migrants vénézuéliens, ainsi que les membres des communautés d'accueil dans les neuf pays de mise en œuvre.

Les interventions du programme sont diverses. La plupart des projets ont une durée moyenne initiale de 15 à 20 mois, mais d'ici décembre 2023, selon les EIC de type 1, "la plupart" ont été prolongés. Les interventions des projets se situent généralement dans les domaines de l'emploi, de l'éducation, y compris l'éducation sexuelle complète, de la santé, y compris la santé et les droits sexuels et reproductifs (SRHR) en tant qu'intervention ciblée, de la protection, de la traite des êtres humains, de la régularisation des migrants et du financement à des conditions de faveur. Le programme soutient la réponse aux besoins de développement, aux risques de sécurité et aux problèmes de migration découlant de la crise des réfugiés et des migrants vénézuéliens. En fin de compte, le programme cherche à améliorer la qualité de vie et la résilience des réfugiés et migrants vénézuéliens et des communautés d'accueil, en particulier des femmes et des filles, ainsi qu'à améliorer la stabilité et la sécurité dans l'ensemble de la région de l'Amérique latine et des Caraïbes.

Les projets du programme sont mis en œuvre par cinq types de partenaires différents : Les agences de l'ONU, les institutions financières internationales, les Organisation non gouvernementale (ONG) internationales, l'Organisation des États américains et les organisations de la société civile (OSC) locales par le biais du Fonds canadien d'initiatives locales du DFATD. Le DFATD et l'IRCC sont les bailleurs de fonds exclusifs du programme. Footnote 1

Le programme comporte neuf résultats immédiats attendus qui devraient à leur tour contribuer à trois résultats intermédiaires alignés sur trois piliers d'intervention : l'intégration socio-économique, la mobilité et la sécurité. Plus précisément, les trois résultats intermédiaires du programme sont les suivants :

Sur le plan organisationnel, le programme est une réponse pangouvernementale du Canada à la crise au Venezuela. Les fonds engagés sont gérés conjointement par quatre entités institutionnelles différentes du gouvernement du Canada :

Champ d'application de l'évaluation

L'objet de l'évaluation est la réponse du Canada à la crise des réfugiés et des migrants vénézuéliens en Amérique latine et dans la région des Caraïbes, un programme de 59,9 millions de dollars sur deux ans en réponse à la crise du déplacement vénézuélien. L'évaluation porte sur l'ensemble du programme, depuis sa création et les activités entreprises jusqu'au début de la collecte des données par l'équipe d'évaluation (ET). Le calendrier initial de mise en œuvre du programme, d'une durée de deux ans, s'étend du 1er avril 2022 au 31 mars 2024, bien qu'au moment de la rédaction du présent rapport d'évaluation (décembre 2023), le DFATD ait informé l'ET qu'" un certain nombre de projets avaient été prolongés au-delà de ce calendrier ".

Méthodologie utilisée

Une évaluation de l'évaluabilité a eu lieu avant l'approbation du plan de travail de l'évaluation. L'évaluation a utilisé une approche non expérimentale qui s'est appuyée sur des données quantitatives et qualitatives et dont les résultats et les conclusions sont essentiellement qualitatifs. L'analyse a été renforcée par la triangulation, c'est-à-dire la comparaison entre différents flux de données. L'ET a pris en compte plusieurs variables simultanément et a travaillé en collaboration avec les représentants des principales parties prenantes pour analyser les résultats potentiels, les produits, les activités et les facteurs contextuels qui ont influencé les interventions et les résultats du projet.

Les principales méthodes de collecte de données utilisées sont les suivantes : collecte et examen de documents, cartographie des projets (voir le volume 2 du présent rapport), entretiens avec des informateurs clés, discussions avec des groupes cibles, études de cas spécifiques à un pays avec visites sur place et sessions de validation. Bien que l'évaluation ait porté sur l'ensemble des 18 projets du portefeuille du programme, un échantillon de huit projets a permis de cibler l'évaluation. Des entretiens avec des informateurs clés ciblés ont permis de collecter des données primaires aux niveaux mondial, régional, national et du projet. Un échantillon de 116 informateurs clés, où les femmes sont bien représentées (67 % du total), a été interrogé.

Cinq études de cas spécifiques à un pays (dont trois ont impliqué des visites dans le pays et sur place) ont été utilisées pour examiner le contexte et les résultats du programme au niveau national. Trois d'entre elles (Colombie, Pérou et Guyane) ont été "approfondies" en ce sens qu'elles comprenaient des visites de pays et de sites par les principaux membres de l'ET et qu'elles ont été soutenues par des consultants locaux compétents. La Guyane a été la première étude de cas et a été réalisée peu après l'approbation du plan de travail. Elle a servi de projet pilote pour tester la méthodologie et les outils d'évaluation. Les plans de travail des autres études de cas ont été ajustés sur la base des enseignements tirés de l'étude pilote.

L'ET a organisé des groupe de discussion (GDD) avec des représentants des parties prenantes dans les trois pays d'étude approfondie. Les GDD ont permis aux responsables locaux de la mise en œuvre des sous-bénéficiaires du projet de s'exprimer, aux bénéficiaires finaux des activités du projet de s'exprimer et aux femmes bénéficiaires de s'exprimer de manière différenciée, ce qui a permis d'enrichir les données ventilées par sexe. Les consultants locaux de l'ET ont dirigé la planification des GDD. Au total, 21 GDD ont eu lieu, impliquant 151 participants, dont 70 % de femmes.

Principales conclusions

Les principales conclusions de l'évaluation sont les suivantes :

  1. Le programme a été explicitement conçu pour répondre aux besoins identifiés et aux priorités des bénéficiaires vulnérables, à savoir les réfugiés et les migrants vénézuéliens, ainsi que les membres des communautés d'accueil.
  2. Le programme était dispersé, les ressources étant réparties entre dix-huit projets et de nombreux sous-projets supplémentaires, et géographiquement réparties dans neuf pays.
  3. L'évaluation des résultats obtenus au niveau du programme est rendue difficile par la logique de sa conception, qui est axée sur la performance des projets individuels et moins sur la synergie, la cohérence et l'intégration des initiatives.
  4. Sur un échantillon de neuf projets, six étaient en bonne voie pour contribuer aux résultats escomptés ; deux projets n'avaient encore aucune preuve du démarrage des activités ; et un projet (00856-003, CUSO) nécessitait plus de temps pour atteindre de manière réaliste l'ambitieuse portée escomptée au Pérou et en Équateur.
  5. Les initiatives de la CFLI, bien que de faible envergure, ont permis de s'assurer que les ressources du programme allaient directement à des OSC éprouvées qui avaient déjà établi des relations au sein des communautés d'accueil et une connaissance directe des réfugiés et des migrants vénézuéliens (VRM).
  6. Le financement du programme permet de soutenir le renforcement efficace des capacités organisationnelles des OSC établies qui sont bien placées pour continuer à offrir des services communautaires fondés sur les meilleures pratiques.
  7. Le programme a délibérément, et généralement avec succès, sélectionné et approuvé des projets conçus pour garantir que les personnes les plus vulnérables, en particulier les femmes et les jeunes filles, soient les premiers bénéficiaires visés. Les exceptions étaient les projets qui visaient plus indirectement les institutions et les fonctionnaires.
  8. À quelques exceptions notables près, la plupart des projets examinés ont fait la preuve d'une mise en œuvre adaptative et spécifique au contexte afin de garantir que les personnes vulnérables, en particulier les femmes et les jeunes filles, soient touchées.
  9. Les projets du portefeuille du programme comportaient un large éventail d'interventions différenciées basées sur les besoins contextuels spécifiques des femmes et des filles.
  10. Le programme est géré par le DFATD et le siège d'IRCC au Canada, les chefs d'équipe de projet (PTL) de la plupart des projets étant également basés au Canada. Il est donc parfois difficile pour les projets de gérer efficacement les résultats face à l'évolution des priorités et des besoins locaux.
  11. Les projets qui disposaient d'une PTL dans le pays et d'un engagement local étroit avec leur partenaire de mise en œuvre avaient une plus grande visibilité. Les projets gérés dans le pays par les ambassades canadiennes par l'intermédiaire de la CFLI disposaient de la structure la plus directe pour faciliter l'exécution du projet, les résultats et la visibilité locale.
  12. Les processus de gestion des connaissances à l'échelle du programme, et plus particulièrement les réunions visant à partager les expériences entre les partenaires chargés de la mise en œuvre de ce programme diversifié, ont été largement absents.
  13. De nombreux projets avaient une portée régionale et la coordination régionale entre les équipes de projet spécifiques à chaque pays était évidente pendant la phase de conception et dans le cadre de certaines activités de formation. Cependant, seules des initiatives limitées dans l'ensemble de ces projets ont encouragé activement la coordination entre les gouvernements des pays concernés.
  14. Au niveau macro, le programme a contribué à favoriser la coordination régionale entre les gouvernements des pays d'accueil, en constituant un élément important de la stratégie diplomatique et humanitaire plus large du Canada pour l'Amérique latine et les Caraïbes.
  15. Les projets étaient de courte durée, et les budgets approuvés ainsi que les résultats escomptés n'étaient souvent pas alignés sur le calendrier de deux ans du programme.
  16. La limite du cycle court du programme a été partiellement atténuée par le fait que la plupart des projets s'inscrivaient dans le prolongement d'efforts plus vastes et continus des partenaires chargés de la mise en œuvre.
  17. La capacité d'absorption du budget disponible n'a pas été un problème pour les PA et leurs OSC partenaires locales.
  18. Les facteurs clés qui ont facilité la capacité du programme à obtenir des résultats sont les suivants : i) des partenariats établis avec des PI de confiance, ii) des OSC expérimentées en tant que sous-traitants des PI, iii) la capacité à étendre des programmes déjà existants, iv) l'existence d'un espace de coordination établi, v) l'utilisation par le DFATD et l'IRCC d'accords de subvention pour contracter des projets, et vi) des éléments favorables de la politique et de la législation du gouvernement d'accueil.
  19. Les principaux facteurs qui ont limité la capacité des projets à obtenir des résultats sont les suivants : i) des résultats intermédiaires trop ambitieux associés à des budgets relativement faibles, ii) un cycle de projet court, iii) des budgets limités qui se répercutent sur les OSC, et iv) un contexte politique instable et une augmentation de l'insécurité dans la région.

Conclusions

La plupart des projets financés par le programme répondaient efficacement aux besoins et aux priorités des migrants vénézuéliens vulnérables et des membres des communautés d'accueil. La théorie sous-jacente du changement pour ces projets était généralement un mélange de prestation de services directs et de gestion de cas avec un engagement fort de GE. Pour une plus petite proportion de projets, la conception visait plutôt les agences et les départements de l'État. Pour ces projets, la théorie du changement était davantage axée sur le renforcement des capacités des fonctionnaires et des processus gouvernementaux. Pour ces projets, il a été plus difficile de confirmer l'efficacité.

Les partenaires chargés de la mise en œuvre, qui se sont concentrés sur la prestation de services directs et la gestion de cas, se sont vu confier certains des projets les plus importants. Ces projets étaient pour la plupart en bonne voie pour atteindre les résultats immédiats escomptés. Compte tenu de la brièveté du calendrier du programme et de la grande dispersion des ressources disponibles, l'ampleur de la contribution du programme à l'obtention de résultats intermédiaires ambitieux était moins certaine.

Les projets étaient pour la plupart des extensions et des élargissements de programmes pluriannuels déjà existants, mis en œuvre par des PI bien établis. Cela a parfois limité la visibilité de la contribution du Canada. Malgré l'importance du programme (près de 60 millions de dollars), il n'a pas été facile d'établir les contributions spécifiques qu'il apporte. C'est peut-être là le résultat le plus inattendu du programme : La contribution du Canada n'a qu'une visibilité limitée dans un pays donné et ne peut pas facilement être attribuée à des résultats de plus haut niveau parce que le programme est dispersé. Les projets les plus modestes sont ceux qui ont été mis en œuvre par l'intermédiaire de la CFLI en faisant appel à des OSC locales en tant que partenaires principaux. Bien que la portée et les résultats escomptés des sous-projets de la CFLI aient été modérés en raison de la faiblesse des budgets et de la brièveté des délais, une grande partie des fonds disponibles a été directement acheminée vers les personnes les plus vulnérables.

Les partenaires des OSC avaient généralement la capacité d'accepter davantage de fonds qui auraient pu être utilisés pour canaliser directement l'aide du DFATD vers les plus vulnérables. Les OSC se sont avérées bien placées pour offrir des services communautaires fondés sur les meilleures pratiques. Le financement des OSC, à la fois en tant que partenaires de mise en œuvre et en tant qu'organisations, aurait pu être plus explicitement inclus dans les accords de subvention.

Les résultats du processus sont plus évidents que les résultats du programme liés au marché du travail : 1) le décaissement rapide de l'engagement du Canada par le DFATD et l'IRCC, 2) l'alignement de la réponse du Canada sur les évaluations des besoins en cours et le suivi mené par la plateforme R4V pour assurer une coordination et une collaboration régionales et nationales globales, 3) l'utilisation largement réussie de PI de confiance pour augmenter rapidement la contribution du Canada, et 4) l'impression positive du Canada en tant qu'interlocuteur crédible alors que les pays de l'ALC et la société civile, ainsi que les donateurs externes, continuent de répondre aux besoins complexes provoqués par la crise au Venezuela. On peut affirmer avec confiance que le programme apporte des ressources nécessaires et urgentes à un plan de réponse multilatéral beaucoup plus vaste et continu.

La plupart des projets examinés ont fait l'objet d'une mise en œuvre adaptative, spécifique au contexte, afin de s'assurer que les MRV vulnérables, et en particulier les femmes et les filles, étaient atteints. Dans l'ensemble, les PI sélectionnés par le DFATD et l'IRCC, ainsi que les projets approuvés, ont systématiquement appliqué une approche sexospécifique pour s'assurer que la programmation était axée sur les personnes les plus vulnérables. Les projets ciblant les institutions et les fonctionnaires ont moins bien réussi à mettre les besoins des femmes au premier plan.

Le programme a soutenu un large éventail d'approches visant à répondre aux besoins différenciés des femmes et des filles. Ces approches différenciées, basées sur les meilleures pratiques établies, ont été mises en œuvre - en grande partie avec succès - par des PA respectés, et généralement dans le cadre de stratégies pluriannuelles plus larges.

L'absence de processus de gestion des connaissances à l'échelle du programme et, plus particulièrement, les possibilités limitées de partage d'expériences entre les partenaires chargés de la mise en œuvre ont caractérisé une enveloppe de financement plutôt qu'un programme cohérent et axé sur les résultats. Le programme ne disposait pas d'une théorie globale du changement. Au contraire, les projets sélectionnés étaient autonomes et indépendants et n'étaient pas liés ou censés travailler ensemble pour créer une synergie en vue d'obtenir des résultats durables au niveau du programme.

Les chefs d'équipe de projet (PTL) étaient pour la plupart basés au Canada, loin de la ligne de front de la crise, ce qui a ajouté à la difficulté de gérer des projets face à des contextes locaux en évolution rapide. La présence d'un chef d'équipe de projet bien informé dans le pays a permis un engagement plus étroit avec les partenaires d'exécution et les contacts avec le gouvernement du pays d'accueil. À plus petite échelle, cette situation a été imitée par les sous-projets de la CFLI qui disposaient de la structure la plus directe pour faciliter l'exécution du projet, les résultats et la visibilité locale.

Bien que la coordination régionale entre les équipes de projet propres à chaque pays ait été évidente au cours de la phase de conception et dans le cadre de certaines activités de formation, seules quelques initiatives ont activement encouragé la coordination entre les neuf gouvernements ciblés par le programme. Le programme a soutenu la coordination régionale entre les gouvernements des pays hôtes en s'inscrivant dans le cadre plus large des efforts diplomatiques, de paix, humanitaires et de développement du Canada dans la région ALC.

L'attente de résultats au niveau du programme est limitée par la brièveté de son calendrier. Les initiatives du programme étaient considérées comme des initiatives de développement plutôt que comme des initiatives humanitaires et, à ce titre, les attentes de résultats plus élevés auraient bénéficié de délais de planification et de mise en œuvre plus longs. La limite du cycle court du programme a été partiellement atténuée par le fait que la plupart des projets s'inscrivaient dans le prolongement d'efforts plus vastes et continus déployés par des partenaires d'exécution déjà établis. Les partenariats établis avec des partenaires principaux de confiance sur lesquels le DFATD et l'IRCC se sont appuyés, les OSC disponibles en tant que sous-traitants et les programmes déjà existants qui ont été complétés, ont été autant de facteurs clés de succès.

Recommandations

L'évaluation a permis de formuler neuf recommandations, résumées ci-dessous :

  1. La crise vénézuélienne continue d'avoir un impact négatif sur la région et au-delà. La nature complexe de la crise, c'est-à-dire les liens entre les impératifs humanitaires, de développement et de paix, et la nécessité d'une intégration socio-économique efficace des migrants pour aider à atténuer d'autres mouvements massifs de population à l'intérieur et à l'extérieur de la région, signifie que le Canada doit maintenir son engagement et son leadership, guidé par l'évaluation des besoins et le plan de réponse défini dans le dernier PMRR des Nations unies.
  2. Pour les futures interventions dans la région, le DFATD et IRCC devraient rationaliser les financements pour toucher moins de pays, moins de projets et moins de secteurs afin que l'engagement global soit plus cohérent, plus axé sur les résultats, plus facile à gérer et qu'il offre une plus grande visibilité au Canada.
  3. Nonobstant la recommandation 2, un petit nombre supplémentaire de partenaires potentiellement utiles peut être envisagé. Toutefois, le DFATD et l'IRCC devraient continuer à collaborer avec des partenaires de mise en œuvre performants déjà engagés dans les secteurs de la santé sexuelle et reproductive, de la violence liée au sexe, de l'enseignement primaire, des compétences et de l'emploi des jeunes, et éviter de créer une liste entièrement nouvelle de partenaires et de secteurs.
  4. Si une nouvelle tranche d'aide au développement est accordée, le Canada devrait rechercher des approches qui englobent les meilleures pratiques sectorielles suivantes :
    1. SDSR - Programmes SDSR qui fournissent des services directs aux réfugiés, aux migrants et aux communautés d'accueil, sensibilisent les individus et les communautés aux droits et aux responsabilités, et soutiennent les OSC, en particulier celles dirigées par des femmes et des jeunes, dans leurs actions liées aux SDSR, y compris en influençant la politique gouvernementale.
    2. Violence liée au sexe - Programmes visant à modifier la dynamique du pouvoir entre les couples par le biais d'un dialogue sur le genre, d'espaces sûrs, de centres de défense des enfants, de lignes d'assistance confidentielles pour les victimes de violence liée au sexe et d'une gestion professionnelle et individualisée des cas.
    3. Enseignement primaire - Programmation qui inclut une participation, une influence et un leadership significatifs de la part des acteurs locaux (OSC, parents et enseignants) pour soutenir une éducation de qualité et inclusive pour les enfants et adolescents réfugiés et migrants vulnérables, de la petite enfance jusqu'à l'enseignement secondaire.
    4. Compétences et emploi des jeunes - Partenariat avec des entreprises appropriées du secteur privé, formation spécifique à l'emploi et approche individualisée de la gestion de cas pour améliorer le taux de placement des populations migrantes et des communautés d'accueil.
  5. Compte tenu de la durée des crises, le DFATD et l'IRCC devraient concevoir la programmation future comme un soutien au développement durable et à plus long terme :
    1. Sur la base d'une diligence raisonnable, les demandes de prolongation du calendrier des PI pour les projets existants devraient être approuvées afin de soutenir la réalisation de résultats de plus haut niveau.
    2. Pour les nouveaux programmes, concevoir des projets avec des échéances de trois ans ou plus (plutôt que deux ans), en accord avec les objectifs de développement à long terme.
    3. Veiller à ce que les futurs objectifs de performance du programme soient conçus de manière à s'aligner de manière réaliste sur les spécificités du contexte de mise en œuvre dans les pays d'Amérique latine et des Caraïbes.
  6. Le développement futur des programmes du DFATD et de l'IRCC en faveur des réfugiés et des migrants vénézuéliens, ainsi que des approches plus larges de la migration dans les Amériques, devrait donner la priorité à des structures de gestion qui rapprochent le plus possible la supervision des projets et la prise de décision du Canada des pays qui accueillent l'aide.
  7. Dans le cadre des projets financés par le Canada, les points focaux du DFATD basés dans les pays devraient continuer à promouvoir des tables rondes programmatiques conçues à dessein pour que les PA y participent, ainsi que les acteurs étatiques, où la coopération et le partage des connaissances peuvent être encouragés.
  8. Dans le cadre des projets approuvés, y compris les accords de subvention nouveaux ou élargis avec les organisations des Nations Unies, le DFATD et l'IRCC devraient rechercher des lignes de financement spécifiques qui soutiennent la croissance organisationnelle (capacités administratives, opérationnelles, personnel, etc.) des OSC impliquées, y compris celles dirigées par des VRM, et concevoir des projets pour canaliser un plus grand pourcentage des ressources disponibles dans cette direction.
  9. Pour soutenir les OSC locales efficaces et atteindre directement les VRM les plus vulnérables, le DFATD devrait canaliser une plus grande partie de sa réponse par le biais de la CFLI existante, dirigée par le pays, en s'efforçant d'utiliser un cycle de mise en œuvre complet de deux ans pour ce fonds.
  10. Étudier la possibilité d'étendre l'offre du mécanisme de subvention à d'autres partenaires en tant que modalité offrant une plus grande flexibilité et une meilleure efficacité de gestion.

Enseignements tirés de l'évaluation

Les principaux enseignements tirés de cette évaluation sont résumés ci-dessous :

  1. Lorsqu'il s'agit de répondre à une crise régionale, sur la base d'un plan de réponse multipartite (par exemple, le PRMR), les objectifs humanitaires et de développement peuvent entrer en conflit. Les objectifs de développement, et en particulier ceux qui incluent l'égalité des chances et un engagement envers les plus vulnérables, requièrent un calendrier plus long. Lorsqu'un programme est largement réparti entre de nombreux pays et secteurs et qu'il comprend un vaste portefeuille de projets avec un éventail de partenaires de mise en œuvre et de sous-traitants, sa capacité à contribuer à des résultats durables en matière de développement devient diffuse, la supervision de la gestion est dispersée et la visibilité du Canada dans les différents pays hôtes est atténuée.
  2. Une approche de programmation pangouvernementale de la réponse aux crises peut rassembler différentes agences canadiennes sous un même programme. Dans ce cas, les compétences en matière de diplomatie, de développement, de migration et de sécurité des frontières ont été réunies dans un seul programme, avec un seul LM et un seul CMR pour guider sa gestion. Cette approche a compliqué et dispersé la gestion du programme et a rendu difficile la cohérence du programme et l'obtention de résultats pouvant être clairement attribués au Canada. Pour être efficace, l'approche pangouvernementale de la programmation du développement nécessite des activités bien financées qui favorisent la synergie et la coordination entre les ministères.
  3. L'évaluation a de nouveau souligné la leçon selon laquelle les projets ont amélioré leur performance en atteignant les VRM vulnérables en travaillant directement avec et par l'intermédiaire des communautés d'accueil. Une leçon corrélée est que lorsque les PI travaillent par l'intermédiaire d'OSC qui ont un engagement égalité de genre (EG) avéré et qui ont déjà établi des relations avec les dirigeants locaux et les partenaires institutionnels, l'assistance peut être rapidement augmentée et le ciblage réussi des plus vulnérables est plus facile. L'aide extérieure aux migrants et aux réfugiés est intrinsèquement politique et, par conséquent, les communautés d'accueil doivent être directement impliquées et incluses en tant que bénéficiaires directs afin d'atténuer les tensions au sein des communautés touchées.
  4. Parmi les bonnes pratiques qui ont fonctionné, citons a) les PI qui ont poursuivi l'analyse des EG pendant la mise en œuvre du projet, b) la flexibilité de la programmation en réponse aux spécificités contextuelles et aux besoins identifiés pour les cas individuels vulnérables, et c) la collaboration avec les OSC locales qui ont déjà établi un contact avec les personnes les plus vulnérables. La mise en place de lignes d'assistance téléphonique, de lieux sûrs pour les femmes et les adolescentes vulnérables, de centres de défense des enfants à guichet unique pour soutenir les filles maltraitées, de formations et de soutiens aux moyens de subsistance destinés aux jeunes femmes et d'un soutien direct aux familles et aux enseignants pour améliorer l'accès à une éducation primaire de qualité sont des types d'initiatives qui pourraient être reproduites et étendues.
  5. Les crises de migration et de réfugiés telles que celle-ci dans la région Amérique Latine et Caraïbes (ALC) se déroulent dans un contexte dynamique, complexe et en constante évolution. L'insécurité, l'instabilité politique, les changements dans les flux de migrants, les changements dans les politiques d'immigration propres à chaque pays, la xénophobie et même les rumeurs propagées par les médias sociaux peuvent modifier les spécificités des défis de développement sur le terrain. Le DFATD et IRCC ont été en mesure de donner aux PE de confiance la flexibilité nécessaire pour intégrer l'aide du Canada dans des programmes déjà actifs et éprouvés. En utilisant principalement une modalité de subvention pour le décaissement de l'aide au développement (plutôt que des accords de contribution plus complexes et exigeants), le DFATD et IRCC ont soutenu le besoin de flexibilité.
  6. Les structures de gestion des projets de développement, dans lesquelles la prise de décision est concentrée au siège du DFATD et de l'IRCC au Canada, rendent difficile l'agilité des gestionnaires de projets individuels. Les PTL du DFATD et de l'IRCC qui travaillent depuis Ottawa, et dont la capacité à se rendre sur les sites de mise en œuvre des projets est limitée, sont désavantagés par le fait qu'ils sont loin de la ligne de front.
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