ALÉNA - Chapitre 11 - Investissement

Poursuites contre le Gouvernement du Canada

Chemtura Corporation (anciennement Crompton Corporation) c. le Gouvernement du Canada

Demandeur

Chemtura Corporation est une entreprise américaine constituée sous le régime des lois de l’État du Delaware. Son siège social est situé à Middlebury, au Connecticut. Chemtura Canada est une filiale indirecte appartenant en propriété exclusive à Chemtura Corporation, constituée sous le régime des lois de la Nouvelle-Écosse. Son installation de fabrication est située à Elmira, en Ontario.

Articles

  • 1103 (Traitement de la nation la plus favorisée)
  • 1105 (Norme minimale de traitement)
  • 1110 (Expropriation)

Dommages réclamés

78.6 millions de dollars américains

État actuel

Gagnée. Le tribunal a rejeté la plainte et accordé 2.9 millions de dollars canadiens pour les frais engagés au Canada. 

Règlement d’arbitrage

CNUDCI

Résumé

Historique des procédures

La demanderesse a déposé deux notifications d’intention de soumettre une plainte à l’arbitrage, la première le 6 novembre 2011, et la deuxième, le 4 avril 2002. Elle a déposé une notification d’arbitrage relativement à ces notifications le 17 octobre 2002. Elle a déposé une troisième notification d’intention de soumettre une plainte à l’arbitrage le 19 septembre 2002. Celle-ci a été suivie d’une notification d’arbitrage le 10 février 2005 réclamant des dommages de l’ordre de 83.1 millions de dollars américains. Ce montant a été révisé ultérieurement à 78.6 millions de dollars américains..

Les audiences ont eu lieu du 2 au 8 septembre 2009 et le 17 décembre 2009. Le tribunal a rendu sa sentence le 2 août 2010, dans laquelle il rejetait toutes les plaintes déposées par la demanderesse et enjoignait à la demanderesse d’assumer la totalité des frais de l’arbitrage ainsi que la moitié des frais juridiques engagés par le Canada, un montant qui totalisait 2.9 millions dollars canadiens.

Résumé des faits et nature des allégations

L’usine de Chemtura Canada à Elmira, en Ontario, fabrique des produits de traitement des semences, lesquels comprennent des produits à base de lindane qui servent à traiter plusieurs variétés de semences, dont le colza. Le lindane est un produit antiparasitaire dont la première homologation sur le marché canadien remonte à 1938. En 1998, des préoccupations commerciales avec les États-Unis ont réuni les producteurs canadiens de colza et les quatre titulaires de produits antiparasitaires à base de lindane (dont la demanderesse) à la table de négociation. Étant donné que le lindane n’est pas autorisé pour le traitement du colza aux États-Unis, les producteurs de colza, qui dépendaient fortement des exportations vers les États-Unis, se préoccupaient de l’interdiction éventuelle d’exportation de leur produit vers les États-Unis. Une entente a été conclue en vertu de laquelle les quatre titulaires accepteraient de plein gré de modifier leurs produits antiparasitaires à base de lindane ou d’abandonner leur production d’ici le 31 décembre 1999 et de mettre fin à toutes les ventes d’ici le 1erjuillet 2001. L’Agence de réglementation de la lutte antiparasitaire (« ARLA ») est l’organisme fédéral responsable de la réglementation des produits antiparasitaires au Canada. L’ARLA a participée aux négociations étant donné qu’à titre d’organisme de réglementation, elle avait la responsabilité de recevoir les avis de modification ou d’abandon de tels produits.

L’ARLA a entrepris un examen spécial des produits antiparasitaires à base de lindane de 1999 à 2001 et a conclu qu’il y avait lieu de mettre fin à l’homologation de ces produits ou de la suspendre en raison de préoccupations pour la santé. Ultérieurement en 2001, l’ARLA a mis fin aux permis de fabrication de produits antiparasitaires renfermant du lindane, dont la demanderesse était titulaire. À la suite d’une demande présentée par la demanderesse, une commission d’examen a été constituée pour se pencher sur l’examen spécial de 2004 à 2005. À la réception du rapport de la commission d’examen, l’ARLA a entrepris une nouvelle évaluation du lindane, qui a abouti à des conclusions similaires que celles de l’examen spécial antérieur sur les risques pour la santé que présente le lindane.

La demanderesse prétendait que l’examen spécial effectué par l’ARLA des produits antiparasitaires à base de lindane de la demanderesse était faussé et injuste et que le gouvernement du Canada avait contrevenu à ses tentatives d’obtenir une nouvelle évaluation de l’examen spécial, conformément à la loi. La demanderesse prétendait que la décision prise par l’ARLA d’interdire la plantation de semences traitées au lindane après le 1er juillet 2001 et le défaut de l'ARLA d’entreprendre un traitement accéléré de l’homologation de produits de remplacement contrevenaient aux assurances que l’Agence lui avait données dans le contexte de l’entente de retrait. Elle prétendait également que l’ARLA avait injustement mis fin à l’homologation de ses produits antiparasitaires à base de lindane. D’après la demanderesse, l’ensemble de ces mesures contrevenait à certains articles de l’ALÉNA : l’article 1105 (Norme minimale de traitement) et l’article 1103 (Traitement de la nation la plus favorisée). Elle a également prétendu que la cessation de l’homologation de ses produits antiparasitaires à base de lindane contrevenait à l’article 1110 (Expropriation) de l’ALÉNA.

Sentence du tribunal

En rejetant les plaintes de la demanderesse fondées sur l’article 1105 de l’ALÉNA, le tribunal a conclu qu’elle n’avait pas établi le fait que l’examen spécial par l’ARLA des produits antiparasitaires à base de lindane avait été effectué de mauvaise foi ou avait enfreint les normes d’application régulière de la loi. Le tribunal a conclu que l’examen spécial par l’ARLA avait été motivé par des considérations scientifiques conformes à son mandat et aux obligations internationales du Canada, et non par des motifs illégitimes. Relativement à la contestation, par la demanderesse, de la justice du processus d’examen de l’ARLA, le tribunal a conclu que le processus n’était ni injuste ni représentatif d’une conduite de mauvaise foi de la part de l’ARLA.

Le tribunal a conclu, en outre, que Chemtura n’avait pas établi que l’entente de retrait avait donné lieu à une attente raisonnable ou légitime voulant que l’ARLA autorise la plantation de semences traitées au lindane après le 1er juillet 2001. Par ailleurs, le tribunal a conclu que l’ARLA n’avait pas injustement retardé le processus d’homologation des produits de remplacement de la demanderesse. Les retards accusés par le requérant lorsqu’il a homologué ses produits étaient attribuables tant à l’ARLA qu’au requérant et étaient similaires aux retards que le requérant avait accusés aux États-Unis.

Le tribunal a aussi conclu que la cessation de l’homologation du lindane de la demanderesse n’était ni punitive ni injuste. L’ARLA avait le pouvoir discrétionnaire d’offrir une élimination graduelle des produits antiparasitaires à base de lindane par le biais d’un abandon de plein gré, et, dans l’exercice de ce pouvoir discrétionnaire, elle a traité tous les titulaires touchés de façon similaire. L’ARLA a offert  à Chemtura la possibilité d’abandonner ses produits de plein gré; en raison de son refus, le tribunal a décidé que la cessation imposée par l’ARLA ne pouvait être jugée punitive ou injuste.

Le tribunal a également soutenu que la conduite du Canada n’avait pas contrevenu à l’article 1103 de l’ALÉNA. Chemtura avait prétendu que cet article lui permettait de tirer parti d’autres traités auxquels le Canada adhérait, qui renfermaient des clauses de traitement juste et équitable. Le tribunal a conclu toutefois que, sans égard au parti éventuel que le requérant pouvait tirer de ces traités par l’entremise de l’article 1103 de l’ALÉNA,  la demanderesse n’avait pas établi le fait que les mesures prises par le Canada constituaient une infraction à ces dispositions de traitement juste et équitable qui étaient prétendument plus favorables.

 

Enfin le tribunal a conclu que la conduite du Canada ne constituait pas une expropriation en vertu de l’article 1110 de l’ALÉNA. Le tribunal a conclu que pour qu’une mesure constitue une expropriation ou équivaille à une expropriation, cette mesure devait sensiblement priver l’investisseur de son investissement. Dans la présente affaire, les parties ont reconnu que l’investissement représentait la filiale de la demanderesse, Chemtura Canada. Étant donné que la vente des produits antiparasitaires à base de lindane ne pèse que pour une part réduite des activités économiques de la filiale, la cessation par l’ARLA de l’homologation de tels produits antiparasitaires ne privait pas sensiblement Chemtura de son investissement. En outre, le tribunal a soutenu que les mesures prises par l’ARLA constituaient un exercice valide des pouvoirs de police, étant donné qu’il s’agissait de mesures non discriminatoires prises pour protéger la santé humaine et l’environnement. À ce titre, elles ne constituent pas une expropriation.

Documents juridiques (tous les documents sont présentés en format pdf)

Cet arbitrage a été régi selon le règlement d'arbitrage de la Commission des Nations Unies pour le droit commercial international (CNUDCI). Pour obtenir des documents supplémentaires relatifs à cet arbitrage, veuillez consulter le site Web de la Cour permanente d’arbitrage.

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